"Things fall apart. Tout s’écroule." Ce sont les mots d’une chanson, mais cela correspond aussi au monde de Percy, qui part en vrille. Cette héroïne très garçon manqué a dû se forger une carapace à seulement 16 ans. Sa mère étant une junkie, elle doit endosser le sens des responsabilités. Une maturité qui n’est pas sans rappeler celle de Justine Lévy face à une image maternelle défaillante. Si ce n’est qu’il s’agit de la première fiction de Travis Mulhauser, né en 1976 aux Etats-Unis. On n’est pas surpris d’apprendre qu’il a été assistant social, tant ses personnages nous renvoient aux revers du rêve américain. Ron Rash, dont il pourrait être "un cousin littéraire", qualifie d’ailleurs Sweetgirl de "roman sans concession". Il est vrai que la pétillante Percy vit dans la misère. Abandonnée par son père, cette adolescente effrontée, en décrochage scolaire, est confrontée à la disparition de sa mère toxicomane. Son instinct la conduit chez Shelton, le dealer. Elle y découvre un couple inconscient et un bébé désespéré. "La seule chose qui m’a étonnée, c’est mon étonnement." Muée par la volonté de sauver la petite, Percy brave la neige, le vent et le froid qui secouent les montagnes inhospitalières du Michigan. Un autre ennemi la poursuit : Shelton, bien décidé à récupérer sa fille. Ce marginal n’a que la violence et la drogue comme alliées, mais bientôt on comprend pourquoi il en est arrivé là. "Le mal qu’il avait fait ne pourrait jamais être réparé." Faisant tout pour ne pas être repérée, Percy sait que les heures du bébé sont comptées. Comment ne pas s’attacher à ce petit être fragilisé ? Au fil de l’aventure, l’armure se fend et l’oblige à grandir. L’écriture nerveuse et dynamique de Mulhauser est à l’image de cette fille courageuse qui ne se laisse pas démonter par l’adversité. Kerenn Elkaïm