Elle ne s'est pas posé de questions. Il aura suffi d'une rencontre, ailleurs, un échange de regards, une nuit, et elle a cessé d'être ce qu'elle ne voulait plus être, elle. Elle y pense, les années passent et elle quitte tout, traverse un océan et s'en va rejoindre cet homme, son Amérique à elle, qu'elle croit professeur d'université, pour le retrouver pompier dans les faubourgs d'une grande ville. C'est lui qu'elle veut, qu'elle a, dans une pauvre maison qui sent la mort et bientôt la jouissance. Et puis aussi l'alcool. Le prince charmant s'avère ne pas lésiner de ce côté, ni de celui de ses trop nombreuses absences. Alors, la femme va vouloir s'aveugler et peu à peu mourir ou le tuer (ce qui revient au même), sans cesser de l'aimer et le désirer, s'abolir dans sa souffrance (il est ce qu'on appelle aujourd'hui bipolaire), la faire sienne. Au-dehors, l'Amérique n'est plus qu'un décor décati, un éternel hiver.

Une fois de plus, avec ce cinquième roman, la comédienne Anne Brochet prend tous les risques et surtout celui de l'intranquillité en littérature. Comme elle est évidemment une écrivaine, pas question ici de s'embourber dans les méandres de la psychologie. Des faits, des méfaits et moins de sentiments que le désordre atroce et merveilleux des passions.