12 octobre > Récit France > Constantin Alexandrakis

Comme tous les Noëls, il a juste "envie de la tuer". A la place, il frappe la table, cogne le mur, casse un miroir. Bref, elle lui tape sur le système. Elle, c’est sa mère. Cette fois-ci, pour l’ambiance, le fameux "esprit de Noël", elle l’embarque à la messe… orthodoxe (à Perpète-lès-Oies). Claire-Hélène est grecque, du moins d’origine. Son père, séparé de sa mère depuis qu’elle est petite, ne lui a rien laissé à part son nom : Alexandrakis. L’office est récité en grec médiéval derrière le jubé, avec force chants, ors et encens. Le fils, un peu groggy à cause du whisky qu’il a ingurgité pour se donner du courage, frôlerait presque l’expérience mystique, alors que sa mère lui tire sur la manche pour qu’ils y aillent. Elle n’y comprend goutte. La messe est dite. Pour eux. Retour en bus, case maison. Le fils fulmine : "Je pense bravo alors que défilent McDo, Carrefour et ronds-points piteux. Ma mère regarde par la fenêtre avec un air affreusement triste - ou alors, à chaque fois qu’elle ouvre la bouche, c’est pour parler d’autre chose et ça m’énerve." Cette bouche lui avait annoncé à ses 12 ans que son père était mort. La fille-mère, mal aimée d’une mère de bonne famille, ex-starlette de cinéma et fanatique d’équitation, préférait être veuve plutôt que mère célibataire. Constantin Alexandrakis, né en 1978, découvre à 33 ans - l’âge christique - que non seulement "[s]on Géniteur" n’est pas décédé, mais qu’il ignorait même qu’il eût un fils. Et Constantin de partir à Athènes à la découverte du paternel (un sexagénaire peu commode) et de la culture grecque antique (la mythologie) et contemporaine (le romaïque, la contestation anar) et de soi-même (les champignons hallucinogènes qui vous ouvrent les portes de la perception).

Deux fois né est le récit de cette quête identitaire sous influence de Mètis, déesse de la ruse, car c’est par mille détours et rebonds - de sa jeunesse difficile à son apprentissage du métier de charpentier en passant par le peyotl mexicain - qu’il nous embarque dans ses sinueuses interrogations existentielles. Sean J. Rose

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