Qui aurait parié, il y a quinze ans, sur la possibilité d’importer en France le concept de la Sant Jordi, fête catalane au cours de laquelle, le 23 avril, hommes et femmes s’offrent depuis le Moyen Age des roses et, depuis 1926, des livres ? Promotrice de l’événement consacré en 1995 par l’Unesco, dans l’indifférence générale, Journée mondiale du livre et du droit d’auteur, l’effervescente Marie-Rose Guarnieri, bouquet de roses en guise de bâton de pèlerin, suscitait alors plus de sourires amusés que d’engagements réels. La directrice de la librairie des Abesses, à Paris (18e), est pourtant parvenue en quelques années à faire de la Saint-Georges la journée de la librairie dans l’Hexagone. Près de 500 libraires indépendants de France et de Belgique participent désormais à la fête programmée cette année pour ce samedi 26 avril et largement médiatisée.
Il est vrai qu’entre-temps, en dépit de ses nombreuses fragilités, la librairie indépendante a fini par apparaître, en France et dans le monde, comme l’alternative culturelle et commerciale la plus cohérente et la plus crédible face au commerce en ligne en plein essor. Avec les multiples animations qu’elle draine, et les vocations qui se sont manifestées à d’autres périodes de l’année chez de nombreux libraires, de La Voie des indés, dans le Nord-Pas-de-Calais, aux Littorales, à Marseille, l’emblématique Saint-Georges encourage initiatives et échanges.
Nombre d’éditeurs aussi répondent à l’ébranlement du monde du livre par l’investissement sur la création, l’échange et le développement, tel le groupe Delcourt qui déménage dans un immeuble deux fois plus grand et bien plus fonctionnel le week-end même de la manifestation Un livre, une rose. Avec son déménagement, quelques mois avant celui d’Hachette Livre à Vanves, le P-DG du groupe, Guy Delcourt, espère bien profiter d’"effets de côtoiements" pour "stimuler l’échange et le travail collectif". Bienvenue dans l’édition 2.0.