Dans le prérapport qu'elle a remis à toutes les entreprises concernées par son enquête sur le marché du livre français en Suisse, la Commission de la concurrence (Comco) se montre très sévère à l'encontre des diffuseurs/distributeurs assurant l'importation, la commercialisation et la logistique de ce marché.

Au terme d'une procédure ouverte en mars 2008 sur des soupçons d'accords illicites contrevenant à la loi sur les cartels, la Commission ne trouve «aucune circonstance atténuante» aux treize entreprises visées, dont huit appartiennent à des groupes français, qui contrôlent qui la quasi-totalité de l'approvisionnement des librairies romandes.

La Comco recommande donc de condamner les diffuseurs et distributeurs au montant maximum de l'amende prévu par la loi, soit 10% du chiffre d'affaires réalisé durant les trois dernières années, auquel il faut ajouter tous les frais de l'enquête. Au vu des 185 millions de francs suisses de chiffre d'affaires réalisé pour la seule année 2011 par les treize entreprises visées, l'amende pourrait atteindre plusieurs dizaines de millions de FS.

Bien qu'ils aient aussi profité du système d'entente, à la fois horizontale et verticale, les libraires n'avaient toutefois pas d'autre choix que d'y adhérer juge la Comco, qui ne prononce donc aucune sanction à leur encontre.

Toutes les entreprises interrogées dans le cadre de cette enquête ont un mois, soit jusqu'au 13 septembre prochain, pour répondre aux accusations détaillées dans ce prérapport.

Discuté depuis des années, le montant de la tabelle censé couvrir les frais d'importation de livres en Suisse est au coeur des investigations de la Comco. Cette tabelle renchérit les prix des livres vendus en Suisse d'environ 20% par rapport aux prix français, mais peut aller jusqu'à 30%, voire plus. La chute récente du cours de l'euro par rapport au FS a exacerbé les critiques.

«Certains livres ont été vendus avec des majorations sans aucune mesure avec le cours de change ni les coûts propres à la Suisse, continuellement invoqués publiquement par les diffuseurs» accuse le rapport. «L'ouverture de l'enquête et les soupçons d'incompatibilité avec la loi sur les cartels n'a nullement freiné ou influencé les pratiques des entreprises en cause» remarquent ses auteurs.