9 octobre Roman Espagne

Willy Uribe- Photo DR/RIVAGES

Pays basque espagnol, 1981. A l’heure du premier désenchantement démocratique, la jeunesse de Bilbao ou de San Sebastián oublie dans les joies mauvaises du nationalisme et (ou) de la dope toute promesse d’avenir. Sergio Santos et Eder Berasaluze Saint-Bercie, la vingtaine, n’échappent pas à la règle. Ils y rajoutent tout de même, en guise d’horizon, le surf qu’ils pratiquent dès qu’ils le peuvent (c’est-à-dire à peu près tout le temps) d’un côté ou de l’autre de la frontière. Sergio, issu d’un milieu très modeste, n’a pas connu son père, ne veut plus rien savoir de sa mère, est toujours puceau et inapte à toute autre activité que le roulage de joints et la glisse sur des vagues qu’il « prend » mieux que personne. Eder, fils de bonne famille en rupture de ban, est son âme damnée. Les deux, liés par une dialectique bien comprise de maître et d’esclave, témoins involontaires du suicide d’une camarade, complices par leur silence, embarquent à bord d’une antique 4L camionnette pour une Cythère qui serait le Maroc, pays du haschich et des vagues en libre accès. L’odyssée rock tournera mal, bien sûr.

Né en 1965 à Bilbao, Willy Uribe a peu ou prou l’âge de ses personnages. Il a bien dû aussi en partager les tourments. Photographe, surfeur émérite, il est surtout l’enfant terrible des lettres basques (aux côtés de Kirmen Uribe, Luisa Etxenike ou Juan Bas). Provocateur, il ne cesse de prendre position dans le débat public (entreprenant en décembre dernier une grève de la faim très médiatisée pour protester contre l’application « à géométrie variable » de grâces judiciaires). Les lecteurs français l’ont découvert l’an dernier avec la publication, déjà chez Rivages, du Prix de mon père. Ce Nous avons aimé, plus beau, plus tendu de chagrin et de colère, achève de l’installer en Jim Thompson de la Biscaye. O. M.

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