8 SEPTEMBRE - LITTÉRATURE Etats-Unis

Peut-on naître poète ? En tout cas, Sylvia Plath développa très tôt une sensibilité pour la poésie, à savoir une propension à vouloir traduire ses sensations et ses sentiments par des mots. Son premier poème fut publié dans le Boston Traveler en août 1941, elle avait 8 ans et demi. Née en 1932 à Boston dans le Massachusetts, Sylvia Plath quitte la Nouvelle-Angleterre pour la vieille Angleterre. La jeune boursière américaine va étudier à Cambridge. Elle y rencontrera cet autre futur grand nom de la poésie anglaise contemporaine, Ted Hughes, qu'elle épousera et avec qui elle vivra jusqu'à son suicide en 1963. Bien qu'installée en Grande-Bretagne depuis les années d'université, elle se sentira toujours américaine (elle trouve les poètes britanniques souvent trop sophistiqués, c'est-à-dire appliqués) pour ce qui est du rapport spontané aux choses, une capacité à capter avec grâce et lucidité le monde qui l'entoure. On pense bien sûr à la sublime nudité des vers d'Emily Dickinson. Mais celui qui, aux yeux de l'auteure d'Ariel, a vraiment ouvert une voie nouvelle est Robert Lowell avec ses Life Studies. Dans un entretien de 1962, elle explique son cheminement poétique : "Je pense que mes poèmes sont immédiatement tirés de mes propres expériences sensorielles et émotionnelles, mais je dois dire que je ne peux pas approuver ces cris du coeur qui ne sont animés par rien d'autre qu'une aiguille ou un couteau, ou quoi que ce soit. [...] L'expérience personnelle est très importante, mais assurément il ne faut pas en faire une sorte de boîte close, un exercice au miroir, une expérience narcissique." Mais chez Plath, l'écriture a beau posséder la simplicité de l'évidence ("Les tulipes sont trop à vif, c'est l'hiver ici"), elle sait chercher d'audacieuses images gothiques, s'inspirant de drames intimes (la sournoise santé qui ne saurait masquer longtemps les meurtrissures du corps et de l'âme) et aussi de l'histoire. D'ascendance allemande et autrichienne, Sylvia Plath, qui n'est pas juive, est toutefois marquée par le traumatisme de la Seconde Guerre mondiale, et particulièrement la Shoah, comme le prouvent plusieurs textes, et formidablement Dame Lazare : "De la cendre je surgis/Avec mes cheveux rouges/Et je dévore les hommes." Grâce à ce nouveau volume qui contient entre autres la traduction inédite du recueil Le colosse et la traduction révisée de son unique roman, La cloche de verre, la collection "Quarto" donne de nouveau accès à l'oeuvre à la fois aérienne et profonde de la poète américaine, dont la voix n'a cessé de se mêler au murmure de la mort.

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