Avec le rire peut-être, il n'y a pas plus rétif (et même contradictoire) à la définition, qui par nature circonscrit, que le sexe. C'est donc dire l'écueil fondamental auquel se confronte ce monumental Sexe libris : dictionnaire rock, historique et politique du sexe signé de l'énigmatique "Camille". Qui est Camille, prénom épicène ? Nul ne le sait, pas même s'il s'agit d'une fille ou d'un garçon (voire d'un collectif d'écriture). Sur le blog Sexpress qu'il ou elle anime sur le site de L'Express (qui succède à un autre blog sur le site de Rue89), Camille se définit ainsi : "Je ne suis pas journaliste, mais j'ai de la curiosité. Sachez que je vois du sexe partout. Je crois que la sexualité structure la vie sociale. Et inversement." Tenons-nous en là, mais regrettons tout de même cet anonymat, tant ne pas savoir "d'où l'on écrit" empêche d'apprécier pleinement "ce que l'on écrit".
Malgré cette réserve, ce dictionnaire fureteur, pluridisciplinaire (pour ne pas dire transgenre...) se révèle en tout point passionnant. Il met le doigt sur les contradictions intimes d'une société libérale avancée incapable de s'assumer comme libertaire. Noblesse oblige, il insiste justement sur la nouvelle forme de révolution sexuelle qu'induit le développement d'Internet. Si le sexe (comme son absence, d'ailleurs) est humain, trop humain, Camille en observe les occurrences modernes avec une vraie humanité, sans s'interdire bien entendu d'y appliquer sa propre subjectivité foncièrement politique. Sans aucune cuistrerie, sans vulgarité non plus, ce dictionnaire répond donc bien à l'objet de la collection dont il est issu et que coordonne le journaliste Hubert Artus : politique donc, mais aussi historique et, finalement, tout ce qu'il y a de plus rock'n'roll.