Il avait 20 ans. N'allez pas lui dire que c'est le plus bel âge de la vie. Pour Gérard Muller, ce fut celui où il reçut un verdict, presque un arrêt de mort, après lequel plus rien, et notamment l'avenir, n'aurait pu être possible. Ce jeune Alsacien, qui se destinait à l'exercice de la pharmacie, apprit ce jour-là qu'il était atteint, de manière génétique et depuis sa naissance, d'une rétinite pigmentaire, une maladie dégénérative de l'œil, qui le condamnait à plus ou moins brève échéance à devenir aveugle. Longtemps pourtant, il voulut faire comme si de rien n'était. Il se maria, eut des enfants, sa pharmacie. Mais à mesure que le jour tombait, ce refuge dans le déni fut source d'une souffrance grandissante. Il lui fallut accepter la maladie pour pouvoir finalement, réinventer sa vie. De ce jour, plus rien de ce qui lui était devenu impossible ne le fut plus tout à fait. Souvent accompagné de sa femme, Anny, et sachant générer autour de lui un vaste réseau de solidarité et surtout d'amitié, Gérard Muller devint pour tous, « l'aventurier aveugle ». Rien ne résistera plus, à pied ou en tandem, à ce sportif accompli, à son incroyable curiosité et à son inflexible détermination. Ni les chemins des Alpes et bientôt du Népal autour de l'Himalaya, ni ceux qui mènent de Paris à Pékin pour rejoindre à temps la capitale chinoise pour les JO 2008, ni ceux de Saint-Jacques-de-Compostelle où il expérimente un procédé de guidage par GPS pour non-voyants, ni les expéditions autour du lac Baïkal, ni même les favelas du Brésil où il demeure de longs mois auprès d'une école pour enfants des rues et aveugles. Car l'aventure chez Gérard Muller ne saurait être égoïste, elle se situe toujours dans une perspective de solidarité, et permet de financer l'aide à la recherche médicale.
C'est cette vie, finalement particulièrement bien remplie, qu'il narre aujourd'hui, aidé par la plume alerte du journaliste Alexandre Fillon, dans Je vois mon bonheur. La principale qualité de ce livre d'espoir est de n'être jamais édifiant, de se tenir à l'orée du « cucul » sans y tomber jamais. Gérard Muller n'oublie personne, et sa reconnaissance va d'abord à tous ceux qui ont rendu sa « rédemption » possible. Il n'oublie pas non plus le caractère spirituel de sa démarche et si ce n'est la foi, la ferveur qui la guide. Un témoignage bien sûr, un parmi les autres, d'un homme qui l'est tout entier.
Je vois mon bonheur : les grands défis de l’Aventurier aveugle
JC Lattès
Tirage: 3 000 ex.
Prix: 17,90 euros ; 200 p.
ISBN: 9782709661768