Comment est née la collection "Chemins nocturnes" ?
C’est arrivé par hasard. A l’époque, le roman policier était très mal vu et nombre d’éditeurs avaient arrêté d’en publier. J’ai reçu par la poste Meurtre chez tante Léonie d’Estelle Monbrun et Un été pourri de Maud Tabachnik ; quelques semaines plus tard, Baka ! de Dominique Sylvain arrivait du Japon. Je me suis souvenue de L’homme aux cercles bleus de Fred Vargas, lu trois ans auparavant. Elle était découragée et n’écrivait plus, mais elle avait un inédit sous le coude, Ceux qui vont mourir te saluent. Tout est parti de ces quatre manuscrits. J’ai appelé la collection "Chemins nocturnes", du titre d’un roman de Gaïto Gazdanov cher à mon cœur.
Quel type de roman recherchez-vous ?
J’ai choisi de ne publier que des écrivains français et mon but est de découvrir de nouveaux auteurs - les manuscrits d’Antonin Varenne, Karim Miské, Alexis Ragougneau sont arrivés par la poste. Il n’y a pas d’école, pas de genre spécifique, pas de filon : ce sont des livres très différents, qui ont en commun la qualité de l’écriture, les personnages, l’atmosphère. L’intrigue chez Fred Vargas est peut-être moins importante que la figure du commissaire Adamsberg. Plus que l’enquête, ce qui m’intéresse est la dimension de la quête.
Comment appréciez-vous la mutation du paysage du polar en vingt ans ?
Dans un roman de Simenon, l’enquêteur est un confesseur, et le coupable recherche une rédemption. En 1995, "Le poulpe" a apporté une bouffée d’oxygène. Avec un côté ludique, il défendait l’idée que tout le monde pouvait écrire. De moi, les gens imaginaient que je ne cherchais que des auteures : j’étais naïve, je ne pensais pas que les choses étaient si codées.
Maintenant le polar explose, et tout le monde s’y est mis. Pour ma part, je ne m’impose ni un rythme de parution (deux à quatre titres par an) ni un seuil de rentabilité. Un véritable écrivain est en avance sur l’époque dans laquelle il vit : Fred Vargas, qui n’a explosé qu’en 2001 alors que son premier livre est paru en 1986, ou Dominique Sylvain ont mis du temps à s’installer.
Comment fêtez-vous cet anniversaire ?
Trente-six titres seront vendus à 8,90 euros de mars à décembre 2014. Nous avons un matériel pour les libraires : affiches A3, livrets d’extraits des enquêtes d’Ingrid Diesel et Lola Jost par Dominique Sylvain, catalogues, tee-shirts. Nos livres sont disponibles au format numérique : le catalogue sera relayé, notamment sur le site de la maison, avec des "bonus" comme le premier chapitre de La madone de Notre-Dame d’Alexis Ragougneau, un "omnibus" de Dominique Sylvain, une mise en avant du roman policier historique… Sont aussi prévus une plaquette sur Dominique Sylvain, une campagne de publicité, des concours, notamment avec Quais du polar où Alexis Ragougneau et Dominique Sylvain sont invités. Notre but est de faire découvrir la collection à une nouvelle génération de libraires et de lecteurs.