Libero Marsell n’aura jamais qu’un souci : répondre de toutes les façons possibles à l’appel de son prénom. Il est encore un enfant, en 1975, lorsque ses parents quittent leur Italie natale pour venir s’installer à Paris. La mère bovaryse en professant que "l’utérus mène le monde", le père, lui, n’est pour son garçon qu’amour et crainte. "J’aimais papa plus que jamais. Il avait cinquante ans, des fossettes au menton et une douceur qui m’inquiétait. Il était tendre, plein de vitalité, un peu bizarre. C’était un homme seul." Libero grandit en essayant de comprendre le chagrin des grandes personnes. Cela passera par l’éblouissement du désir et, dans un premier temps, par la quête longtemps vaine de la perte de sa virginité. Puis il y aura la vie qui passe, les filles qui font pareil, la perte des êtres aimés, Paris, Milan et New York comme autant d’écrins à l’éducation sentimentale et sexuelle de Libero. Il est chaste, obsédé et doux. C’est un Antoine Doinel transalpin qui est le héros de Mes impudeurs, qui fut en Italie l’un des plus grands succès de l’année dernière, deuxième roman traduit en français, après Le génie de l’éléphant (Rivages, 2012), du "wonder boy" trentenaire des lettres italiennes, Marco Missiroli.
Si Missiroli est encore inconnu en France, ce livre a tout pour lui permettre de rencontrer enfin le plus large public. Tout, c’est-à-dire une vitalité, une jeunesse très "nouvelle vague", où le trivial vient en quelque sorte comme exhausser ou justifier l’émotion. Il s’adresse aux garçons qui se souviennent avoir raté leur bac en rêvassant aux seins de la sœur de leur meilleur copain, ou aux colères de McEnroe, ou au fait que la vraie vie est ailleurs. Normalement, cela fait du monde. O. M.