Anniversaire

Née revue militante dans la région marseillaise en 1990, Agone fête cette année son quart de siècle en restant plus que jamais fidèle à ses valeurs. Publiés en 1998 et signant le passage au statut de maison d’édition associative, Les chiens de garde de Paul Nizan ou Responsabilité des intellectuels de Noam Chomsky posaient déjà les contours d’une ligne éditoriale sans concession, dont Agone n’a pas dérogé en vingt-cinq ans : "Combattre sans cesse l’instrumentalisation du savoir et les académismes", selon la directrice éditoriale Marie Hermann. S’appuyant sur Pierre Bourdieu, portée par les mouvements émergents antimondialisation et intégrée à un renouveau de l’édition militante à l’aube du XXIe siècle - avec La Fabrique, fondée en 1998 par Eric Hazan, ou les éditions du Croquant, nées en 2003 -, la maison a assis sa légitimité grâce à plusieurs titres emblématiques. De A quoi sert "l’identité nationale" ? de Gérard Noiriel, au Petit-bourgeois gentilhomme d’Alain Accardo, vingt-cinq d’entre eux sont reproposés aux libraires à des conditions préférentielles (surremises et possibilités de retours toute l’année) et à travers une plaquette spécialement conçue pour les 25 ans. "Elle met en valeur la cohérence de notre catalogue, et permet de faire remonter le fonds, qui représente plus de 50 % de notre chiffre d’affaires", note Marie Hermann. Impossible cependant d’évoquer le parcours d’Agone sans mentionner sa locomotive, Une histoire populaire des Etats-Unis, publiée en 2002 et où l’Américain Howard Zinn retrace les événements de son pays en donnant la parole à ses acteurs les plus modestes. "Certains éditeurs avaient déjà envisagé de le publier, mais avaient été découragés par le coût du projet. Kamikazes, nous avons fini par le traduire, sept ans après sa sortie outre-Atlantique", détaille la directrice. En 2015, le titre s’offre une nouvelle jeunesse puisqu’il fait l’objet d’une trilogie documentaire signée Olivier Azam et Daniel Mermet, dont la première partie est en salle depuis le 29 avril, mais aussi, à la rentrée, d’un livre-DVD conçu avec la coopérative audiovisuelle Les Mutins de Pangée et consistant en une lecture de témoignages d’ouvriers, d’Amérindiens, de vétérans du Vietnam par… des acteurs hollywoodiens ! "Cela peut surprendre, mais Matt Damon a découvert le texte et participé à le faire connaître aux Etats-Unis", sourit Marie Hermann. Le projet est aussi le signe d’une ouverture d’Agone, si ce n’est à plus de légèreté, au moins à plus d’optimisme. Depuis le conflit du tout début 2013, qui a vu cinq salariés claquer la porte, les esprits se sont apaisés et l’équipe se mobilise désormais autour des nouveaux défis : "100 000 signes", une collection transversale dont les premiers titres sont parus en avril, et une ligne de littérature semi-poche pour 2016 "s’éloignant un peu des constats moroses pour aller vers des textes porteurs d’espoir".Marine Durand

Les dernières
actualités