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Attention, premiers romans !

Attention, premiers romans !

A deux mois de la rentrée littéraire, la Société des gens de lettres a consacré, le 24 juin, une journée d’étude aux premiers romans, dans le prolongement de l’enquête de Bertrand Legendre et Corinne Abensour, Entrer en littérature (Arkhê, 2012). Verbatims.

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Par Catherine Andreucci
avec Créé le 11.10.2013 à 19h29 ,
Mis à jour le 11.10.2013 à 23h52

Joie et fragilité

“Nous partageons cette espèce d’euphorie de la première fois : l’auteur est content d’être publié et nous sommes contents de le publier. C’est plus difficile au deuxième, au troisième livre, quand l’auteur est en train de construire un projet éditorial. On espère un mouvement ascendant plutôt qu’une indifférence. C’est là que les auteurs sont fragiles, et qu’il nous faut être encore plus présents. Le premier roman procure une joie extraordinaire qui fait qu’on peut passer sur certaines choses. La fragilité ensuite est encore plus grande. La vie d’un auteur et d’un éditeur, c’est de gérer une fragilité constante.?

Joëlle Losfeld, directrice des éditions Joëlle Losfeld

Risque économique

“Nous avons publié beaucoup de premiers romans dès le départ. Economiquement, le risque est grand, et nous allions à la catastrophe. Nous avons donc créé en 1999 une collection, « 1er/mille », moins chère à fabriquer, avec un seuil de rentabilité moindre. Le premier titre, Neige de Maxence Fermine, a été un succès incroyable qui a lancé la collection. […] Dans une rentrée, pour une poignée de premiers romans qui ont une visibilité, il y a énormément de flops financiers. Nous tirons les nôtres à 3 000 exemplaires et notre seuil de rentabilité s’établit entre 1 200 et 1 500 ventes. Or, le nombre de premiers romans qui dépassent les 1 000 ventes n’est pas très élevé. Même s’il y a eu des contre-exemples ces dernières années avec des textes très aboutis, très forts.?

Catherine Guillebaud, directrice littéraire des éditions Arléa

Sympathie a priori

“Je lis les premiers romans avec plus d’attention que les romans d’auteurs déjà installés. C’est un très beau moment de lecture. […] Quand on lit un premier roman, je crois qu’on a une sympathie a priori. Parfois, c’est très mal ficelé, mais on se dira : il y a quelque chose, en dépit des défauts. Au troisième roman du même auteur, on ne lui laissera peut-être pas passer ce qu’on lui laissait passer au début.?

Christine Ferniot, journaliste à Télérama et Lire, jurée du prix du Premier roman

Acquisition et valorisation

“Dans les bibliothèques de la Ville de Paris, l’opération « Premiers romans » a un double enjeu. Il s’agit d’abord de donner aux romans une visibilité, de participer à la construction de la valeur littéraire, d’apporter un soutien. Ensuite, pour les bibliothèques, l’enjeu est de manifester l’intérêt pour la nouveauté, de montrer qu’elles sont aux prises avec la création, qu’elles contribuent à dénicher des talents. […] Cette opération a un effet symbolique. On note aussi un effet de légitimation conjointe : si le premier roman sélectionné a, en plus, de la presse, il va être acheté par le réseau de manière plus large. Mais l’acquisition ne suffit pas. Les livres sont empruntés surtout s’ils sont exposés et valorisés.?

Cécile Rabot, maître de conférences en sciences de l’information et de la communication à l’université Paris Ouest-Nanterre La Défense

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