Promettant de "changer, ensemble, le destin du Brésil", Jair Bolsonaro a largement remporté, dimanche 29 octobre, l'élection présidentielle avec 55,13% des voix, contre 44,87% à son adversaire de gauche, Fernando Haddad, faisant ainsi basculer le Brésil à l'extrême droite. Lors du second tour de l'élection présidentielle, des Brésiliens se sont rendus aux urnes avec un livre, un pied de nez aux partisans du leader de l'extrême-droite qui s'étaient photographiés au premier tour votant avec une arme.
Toute la journée, des photos d'électeurs de gauche brandissant un livre dans leur bureau de vote ont ainsi fleuri sur les réseaux sociaux. "Je suis allée voter avec ce livre, et vous ?", demandait sur Facebook, Eliane Brum, accompagnant son message d'une photo de la couverture d'un livre intitulé La déshumanisation de l'écrivain portugais Valter Hugo. "J'en ai pris deux", lui répondait sur Twiter un autre internaute, affichant la couverture de L'importance de lire du pédagogue brésilien Paulo Freire, et celle d'un ouvrage du prix Nobel de littérature, le Portugais José Saramago. Femmes, races et classes de la militante américaine des droits civils Angela Davis a servi de compagnon de vote à Daiene, jeune femme noire, en réponse aux sorties racistes et misogynes de Jair Bolsonaro. Plusieurs célébrités brésiliennes, dont l'actrice Deborah Secco, ont également participé au mouvement.
"Restrictions de la liberté d'expression"
Des actions symboliques en forme de clins d'œil au "professeur" Fernando Haddad, le candidat du Parti des travailleurs (PT), un universitaire qui fut ministre de l'Education sous le mandat de son mentor, l'ex-président Lula. Mais aussi une réponse à la violence prônée par les partisans de Jair Bolsonaro, un ultra-conservateur qui a lui-même promis pendant la campagne de "purger" le pays des "marginaux rouges". Au premier tour, le 7 octobre, plusieurs photos montrant une arme à côté d'urnes électroniques avaient été diffusées sur les réseaux sociaux. Le Tribunal électoral supérieur (TSE) avait annoncé l'ouverture d'une enquête.
Plus tôt dans le mois, plus de 4000 représentants du monde du livre brésilien avaient appelé au soutien de la candidature de Fernando Haddad à la présidence. Dans un texte intitulé "Manifeste du livre", publié le 16 octobre en ligne, les signataires y expriment leurs inquiétudes quant aux "restrictions de la liberté d'expression" et aux "censures de livres" portées par Jair Bolsonaro, qui prendra ses fonctions de nouveau président du Brésil en janvier prochain.