« Dans notre monde, il y a les vivants et les mourants. » Les premiers ont souvent tendance à oublier qu'ils passeront forcément par la condition des seconds. Tel est pourtant le sort de l'humanité qui aspire à la jeunesse éternelle ou l'éternité. La réalité semble tellement terrifiante que la société préfère l'occulter, alors qu'elle fait juste partie de l'existence. Il en va de même de nos personnes âgées ou de nos morts. Céline Malraux est particulièrement liée à eux, à leur histoire, à leur mémoire. Membre du jury du prix André-Malraux, elle avait consacré un superbe ouvrage (Avec une légère intimité) à sa grand-mère, la pianiste Madeleine Malraux. Les mots lui ont été transmis au berceau, mais c'est la première fois que la jeune femme - qui elle-même les transmet bénévolement en prison dans le cadre de l'association Lire pour en sortir - se lance dans la fiction. Son héroïne, Victoire, porte un enfant, mais elle s'apprête à offrir la mort à l'un de ses proches vieillissant. Comment faire cohabiter la future naissance avec Thanatos ? Dans Le Robert de la langue française de 1957, l'euthanasie désigne « une mort douce et sans souffrance, survenant grâce à l'emploi de substances calmantes ou stupéfiantes. Théorie selon laquelle il est légitime de précipiter la mort de malades incurables pour leur éviter les souffrances de l'agonie ». Pour saisir le cheminement de Victoire, l'autrice nous la présente deux ans auparavant, alors que, infirmière croyante, elle s'avère dévouée face à « ces alités fragiles comme des enfants ». Elle a tendance à materner ses patients, afin de leur donner un peu de réconfort et de paix, mais elle se sent parfois tiraillée. Elle-même n'a pas été épargnée par la douleur... Alors que Victoire a grandi sans père, elle va devoir recomposer son puzzle familial avant d'aborder la maternité. Pas évident de se construire avec tant de non-dits, mais une lettre venue du passé va tout changer. « C'est bien avant la fin qu'il faut se dire les choses importantes. » Y compris à sa famille de cœur, composée de Marc et d'Éloi, un voisin de 90 ans auquel Victoire est si attachée. Ils lui ouvrent tant de portes insoupçonnées, dans cette incroyable culture des Caraïbes. « La mort, c'est le néant. Sans la mort, ce serait aussi le néant ! La vie donne du sens à la mort. Voilà la clé du dilemme. »
Impasse parole
Caraïbéditions
Tirage: 3 000 ex.
Prix: 20,70 € ; 288 p.
ISBN: 9782373111354