Assises de l'édition indépendante 2025

Les grandes tendances de l'édition indépendante dévoilées dans une étude de la Fedei

L’étude de la FEDEI met en évidence un secteur indépendant où la précarité coexiste avec une forte résilience - Photo © ED

Les grandes tendances de l'édition indépendante dévoilées dans une étude de la Fedei

Une étude socio-économique a lancé les 2e Assises de l’édition indépendante, à Bordeaux, et mis en lumière la situation très disparate selon le volume d’activité généré des dirigeants des structures éditoriales indépendantes.

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Par Éric Dupuy à Bordeaux,
Créé le 20.02.2025 à 17h01 ,
Mis à jour le 20.02.2025 à 22h44

Précarité économique et manque de reconnaissance se dégagent d’une étude inédite* publiée ce jeudi 20 février pour lancer les 2e assises nationales de l’édition, à Bordeaux.

Fortes disparités

Portée par la Fédération des éditions indépendantes (Fedei) et réalisée par le cabinet indépendant Axiales avec le soutien du ministère de la Culture, cette étude est basée sur les réponses de 278 répondants parmi un volume estimé de 2 427 éditeurs indépendants en France.

Parmi ces répondants, seuls 183 ont déclaré leur chiffre d'affaires, qui représente un total cumulé de 30 millions d’euros, avec une moyenne de 164 000 euros par maison, mais un chiffre d'affaires médian nettement inférieur s'établissant à 49 000 euros, révélateur des fortes disparités du secteur. Ainsi, seules 14 maisons d’édition (8 %) dépassent les 500 000 euros de chiffre d'affaires. Elles génèrent à elles seules 47 % de l'activité globale. En 2023, lors des premières Assises tenues à Aix-en-Provence, une autre étude de la Fedei avait dévoilé qu'avec plus de 337 millions d'euros de chiffre d'affaires, l'édition indépendante représentait plus de 10 % du marché du livre en France.

Le recours à l’emprunt

Avec un classement en cinq catégories selon le chiffre d’affaires livre généré, il apparait que les difficultés les plus marquées se trouvent dans la catégorie intermédiaire (CA compris entre 75 000 et 250 000 euros). Il est notamment marqué que ces structures sont celles qui ont, de loin, le plus recours à l’emprunt, qui concerne près de 80 % des répondants. « Je me suis bien reconnu dans ce qui était traduit par ces chiffres », commente Dominique Tourte, directeur général de la Fedei et également dirigeant de la maison d’édition Invenit, qui réalise 200 000 euros de chiffre d’affaires dans le livre.

Modèles économiques sous pression

La structure des coûts pèse lourdement sur ces maisons. L’impression représente en moyenne 32 % du chiffre d'affaires livre, et jusqu’à 81 % pour les éditeurs les plus petits. La masse salariale absorbe 20 % du CA total, tandis que la diffusion et la distribution peuvent capter jusqu’à 56 % des revenus.

Ces charges expliquent une rentabilité fragile : le résultat net moyen est de -1,1 %, avec des déficits plus marqués pour les maisons de taille intermédiaire (-9,6 % pour la catégorie D). Seules les plus petites structures (CA < 25 000 euros) dégagent un résultat positif grâce à des activités annexes (+7,7 %).

Un métier chronophage et précaire

L’un des axes principaux de l’étude est l’analyse de la situation des dirigeants de maisons d’édition indépendantes. Le constat est sans appel : beaucoup doivent cumuler plusieurs activités pour assurer la pérennité de leur structure. Les conditions de travail sont particulièrement exigeantes. 72 % des dirigeants travaillent plus de 35 heures par semaine, et 34 % dépassent les 45 heures.

Leur rémunération reste faible : 50 % perçoivent moins de 15 000 euros par an, et 47 % exercent une autre activité pour compléter leurs revenus. Parmi les éditeurs indépendants, 67 % ont bénéficié d’aides publiques ou privées, avec un montant médian de 6 000 euros.

Des stratégies de survie variées

Pour pallier la fragilité du modèle économique, 42 % des maisons développent des activités annexes (animation culturelle, graphisme, presse). Les ventes directes représentent 30 % du chiffre d'affaires, et sont plus fréquentes chez les plus petits éditeurs (50 % pour les autodiffusés). L’autoédition et la diffusion indépendante restent majoritaires dans les catégories les plus modestes, tandis que les maisons plus établies privilégient la diffusion déléguée.

Etude édition indépendante FEDEI
Plus le niveau du chiffre d'affaires est élevé, plus les associations se font rares dans les structures éditoriales indépendantes- Photo © ED

Les difficultés ne sont pas seulement économiques : elles concernent aussi la visibilité et la reconnaissance du métier d’éditeur indépendant. Pour Dominique Tourte, il est urgent de définir « une meilleure reconnaissance du secteur indépendant auprès du grand public et des pouvoirs publics et de poursuivre la réflexion sur la chaîne du livre car si les éditeurs souffrent, les auteurs aussi ».

Vers un cadre législatif ?

L’indépendant dénonce notamment un système basé sur des flux financiers déséquilibrés, avec des paiements et des retours qui pèsent lourdement sur les éditeurs indépendants. « On est dans un moment charnière, vraiment critique », argue-t-il en appelant à un nouveau cadre législatif et une loi structurante comme a pu l'être en 1981 la loi Lang. Les Assises de l’édition indépendante qui se terminent ce vendredi à Bordeaux, pourraient être le point de départ de cette réflexion.

 *Retrouvez l’ensemble de l’étude de la Fedei en document partagé à gauche de l’article

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