Le 17 juillet dernier, le CSA a mis en garde France Culture pour avoir, au printemps, diffusé des propos d'Aldo Naouri considérés, « en l'absence de contextualisation et de réaction de l'animateur aux propos de l'invité » comme pouvant « être assimilés à une incitation au viol conjugal ». Le pédiatre auteur de best-sellers avait en effet raconté ainsi une des ses consultations : « Ce monsieur s'évertuait à dire qu'il attendait qu'elle veuille bien (...). Je lui dis « mais violez-la, Monsieur », et à ce moment-là, la dame a un sourire jusqu'aux oreilles. » Les délits de provocation ou d'apologie sont très nombreux en droit français, et s'appliquent en particulier aux médias et à l'édition de livres. Ils sont pour la plupart visés dans la loi du 29 juillet 1881 dite « sur la liberté de la presse » et sont pénalement réprimés, de façon générale, à la condition d'avoir été suivis d'effet. En clair, il est nécessaire que l'écrit litigieux ait entraîné la commission d'actes prohibés. En revanche, l'article 24 de la même loi n'exige pas, dans le cas de certaines provocations, qu'elles aient été suivies d'effet pour que leurs auteurs soient poursuivis. Il s'agit des provocations au vol, au meurtre, au pillage, à l'incendie, aux crimes et délits contre la sûreté de l'État. Il en est de même des provocations à d'autres infractions visées aux articles 222-6 à 222-16 (qui concernent notamment les « violences ») et 322-6 (relatives en particulier aux « destructions, dégradations et détériorations dangereuses pour les personnes ») du Code pénal, parmi lesquelles se trouve le viol. Sont également répréhensibles, selon le même texte, la simple apologie des crimes et délits spécifiques, ainsi que celle des crimes de guerre, des crimes contre l'humanité ou crimes et délits de collaboration avec l'ennemi. Enfin, l'article 24 vise encore les provocations « à la discrimination, à la haine ou à la violence à l'égard d'une personne ou d'un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée », que ces provocations soient suivies d'effet ou non. L'article 25 de la loi de 1881 sanctionne ainsi les provocations visant les militaires « dans le but de les détourner de leurs devoirs militaires et de l'obéissance qu'ils doivent à leurs chefs dans tout ce qu'ils leur commandent pour l'exécution des lois et règlements militaires »... De même, les articles premier de la loi du 28 juillet 1962 et 20 et 21 de la loi du 6 juillet 1966 visent les « provocations à la désobéissance des assujettis au service de la Défense et des jeunes gens affectés au service de la coopération et de l'aide technique ». L'article 476-3 du Code de justice militaire concerne la provocation de « militaires et marins à passer au service d'une puissance étrangère » et la participation à une « entreprise de démoralisation de l'armée ». Certains articles du Code pénal s'appliquent également à d'autres provocations relevant du domaine militaire puisqu'on y trouve, à l'article 411-11, la provocation à la trahison et à l'espionnage, à l'article 413-1, la provocation à passer à l'ennemi, à l'article 413-3, la provocation à la désobéissance, et à l'article 413-4, la provocation à une entreprise de démoralisation de l'armée ! Le même code vise par ailleurs les provocations aux attroupements (article 431-6) et à l'abandon d'enfants (article 227-12). Quant au Code de la santé publique, il réprime, en ses articles 647 à 649, la provocation à l'avortement, tandis que l'incitation au refus collectif de paiement de l'impôt est visée par l'article 1747 du Code général des impôts. L'article 3 de la loi du 1 er août 1905 concerne la provocation à l'usage des denrées falsifiées ; la loi du 18 août 1936, dans son ensemble, la provocation à des actes portant atteinte au crédit de la Nation et l'article 35 de la loi du 9 décembre 1905, la provocation par les ministres du culte à la résistance aux lois. La provocation au suicide et celle à l'usage des stupéfiants ont été souvent évoquées ces dernières années à l'encontre de diverses publications. Rappelons que c'est une loi du 31 décembre 1987, adoptée en réaction au livre Suicide mode d'emploi qui a instauré, en droit français, le délit de provocation au suicide. Et ce même, si d'autres provocations semblent être tombées totalement en désuétude, telle la propagande anarchiste, prévue par la loi du 28 juillet 1894 qui servit, notamment, à inculper Aragon en 1932 pour la publication de Front rouge .