Les éditions Gallmeister n'ont pas fini de sortir de leurs stetsons des écrivains américains marquants. Après Pete From - l'auteur d'Indian Creek (2006) et de deux somptueux recueils de nouvelles -, Howard McCord - poète dont le court roman, L'homme qui marchait sur la lune, a été récemment repris dans la collection "Totem" -, ou David Vann, qu'on ne présente plus, voici que nous arrive en janvier le Texan Bruce Machart, et son prodigieux coup d'essai, Le sillage de l'oubli.
Celui-ci a manifestement déjà un sens évident de la dramaturgie et du découpage. Nous voici d'abord projetés en 1895. Lorsque Vaclav Skala, Tchèque émigré aux Etats-Unis, perd son épouse, Klara, après qu'elle a accouché de leur quatrième garçon. En 1910, Vaclav est désormais à la tête de la plus grosse exploitation de Lavaca County. Il bichonne ses chevaux de course en mâchonnant ses chiques de tabac pendant que ses fils, Stan, Thomas, Eddie et Karel, triment dans les champs de coton derrière la charrue. Guillermo Villasenor, un riche espagnol, a quant à lui trois filles qu'il veut marier. On ne peut pas les rater, avec leurs yeux et leurs cheveux noirs, leurs hanches étroites et leurs mollets fermes et bruns.
En 1924, Karel est marié à une femme robuste et pieuse qui lui a donné deux filles et s'apprête à accoucher de leur troisième enfant alors qu'elle est à l'église. Les frères Skala ne se sont pas retrouvés ensemble depuis un bon moment. Karel, le cadet, a hérité les terres de son défunt père... Bruce Machart effectue des allers et retours dans le temps. Il réussit à ménager le suspense, dévoile progressivement les zones d'ombre d'une famille tourmentée. Le roué débutant alterne avec brio les montées d'adrénaline et les coups de tonnerre, les courses frénétiques, les étreintes sensuelles et les bagarres violentes. Un écrivain est né.