Entre la ministre de la Culture Rima Abdul-Malak, le président du groupe Madrigall Antoine Gallimard et la lauréate 2023 du prix Renaudot Anne Scott, difficile d’imaginer un casting littéraire plus prestigieux. Mercredi 15 novembre, le Centre national du livre (CNL) ouvrait la deuxième édition de son dîner des primo-romanciers, un temps d’échange où douze jeunes auteurs sont accompagnés par un parrain ou une marraine de leur choix, sélectionnés parmi le cercle d’auteurs confirmé que compte la littérature contemporaine. La soirée a débuté dans la librairie 7L, un espace mythique consacré aux arts visuels, fondé par Karl Lagerfeld puis acquis en 2021 par la maison Chanel. Les invités ont pu y découvrir en avant-première Collisions pour piano & accordéon, un morceau composé par Samir Amarouch.
Velouté de courges, crème fouettée au foin et huile d’agrumes
Une version littéraire du dîner des révélations des César, donc, où célébrités du monde de la culture, mets raffinés concoctés par les cofondateurs de l’étoilé Septime et primo-romanciers se mêlent dans une ambiance joyeuse ponctuée d’éclats de rire. Présente aux côtés de son éditrice, la directrice éditoriale de Rivages, Emilie Colombani, Benoît Coquil fait partie de ces jeunes auteurs. Il a choisi comme marraine Maylis de Kerangal, une romancière qu’il aime lire. “Elle arrive vraiment à créer un monde”, insiste-t-il sur le chemin qui mène au CNL où la suite du dîner se poursuit. Rue de Verneuil, l’ancien photographe Franck Courtès semble paniqué. Foulard rouge autour du cou, il balaie la foule du regard et lance avant de se frayer un passage : “J’ai perdu mon filleul, il faut que je rattrape le coup !”.
Derrière lui, tandis que les grandes figures du monde du livre, la présidente du CNL Régine Hatchondo, la directrice des éditions Lattès Véronique Cardi ou encore le directeur des éditions Seghers Antoine Caro prennent la pose devant le photocall, les binômes comment à se former. L’autrice star de P.O.L, Marie Darrieussecq retrouve Joséphine Tassy et le Goncourt 2018, Nicolas Mathieu, son filleul Mehdi Ouraoui.
Truite de Banka, beurre de Savagnin et choux pointu grillé
“Avez-vous lu le livre de Morgane Az ?”, s’inquiète Carole Martinez, la marraine de l’écrivaine. Elle poursuit : “C’est tellement facile de ne pas aimer un livre que j’ai eu peur quand Morgane m’a demandé de la suivre mais je peux vous assurer que ce livre est une pépite. J’ai même pleuré à la fin.” Les deux femmes échangent un regard complice et partent dans une longue discussion qui ne se terminera qu'une fois le repas terminé. Catherine Cusset, à la même table, approuve. Comme sa consœur de maison (les deux autrices sont publiées chez Gallimard), elle ne connaissait pas l’écriture de son filleul, Jérôme Aumont mais depuis qu’elle l’a découvert, elle ne regrette pas le voyage. “L’objectif de ce dîner est de favoriser la solidarité intergénérationnelle entre des auteurs débutants et les auteurs confirmés”, avait prévenu Régine Hatchondo. C’est chose faite, les romanciers jouent le jeu et les conseils d’écriture commencent à s’échanger aussi bien que les numéros de téléphone.
Arlette, crème légère au melilot et coing
Dans le bruissement des discussions et du passage au dessert, certaines silhouettes s'éclipsent. Dans la cour intérieure, devant le photocall désormais désert, elles échangent quelques anecdotes. Si certains auteurs comme l’historienne Cécile Desprairie et son parrain, l’auteur et journaliste fan d’histoire François-Guillaume Lorrain, se réunissent autour d’une passion commune évidente, ce n’est pas le cas pour l’étonnant binôme Raphaël Zamochnikoff-Laurent Seksik. Accompagné de sa directrice littéraire chez Belfond Magali Langlade, le primo-romancier raconte : “Je ne savais pas vraiment qui choisir alors avec ma femme, nous nous sommes chacun mis devant notre bibliothèque et avons égrené les noms d’auteurs avant de tomber d’accord. Il faut dire que Laurent Seksik est un super auteur !”. L’intéressé explose de rire et entraîne son filleul à l’intérieur de la salle.
À la sortie, marraines, parrains et filleuls se promettent qu’ils vont se revoir. Maylis de Kerangal prévoit un café avec Benoît Coquil tandis que Joséphine Tassy et Marie Darrieussecq sont penchées l’une vers l’autre dans une discussion à bâtons rompus. De quoi créer des binômes aussi pérennes que l’année dernière comme celui de Maria Larrea et Marie-Hélène Lafon qui se retrouvent depuis leur rencontre au précédent dîner de salon en salon. “Elle est devenue ma marraine littéraire”, conclut Maria Larrea.