Pas de fumée sans feu : si le secteur de l'édition universitaire traverse une période particulièrement fumeuse, c'est parce que l'université elle-même se trouve prise dans une sorte de fusion dans laquelle plus personne ne sait où donner de la tête. En 2007, la loi relative aux universités (loi LRU) a engagé les facs dans un processus d'autonomisation long et difficile. A peine était-elle adoptée que la ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche d'alors, Valérie Pécresse, engageait le plan pour la réussite en licence, dont le premier volet était lancé début 2008, le deuxième en 2010, et le troisième en juin dernier. Il s'agit de réformer totalement les maquettes des cours sur les trois premières années du cursus universitaire, avec pour objectif de développer les cours de méthodologie, de standardiser le volume horaire annuel, de diversifier les modes d'évaluation et les prérogatives des enseignants.
Corollaire immédiat : la quasi-disparition de la prescription à l'université. "Les enseignants ont d'autres chats à fouetter avec les différentes réformes que de prescrire tel ou tel titre", constate François Gèze, P-DG des éditions de la Découverte et président du groupe des éditeurs universitaires du Syndicat national de l'édition (SNE). "Au Canada, la prescription fonctionne très bien, rappelle Emmanuel Leclerc, directeur éditorial chez Lavoisier. Il s'agit aussi d'une culture universitaire française." Or "la prescription est indispensable", comme s'accordent à le dire Frédéric Jongen, directeur éditorial pour le supérieur chez De Boeck, et Charles Bimbenet, directeur du département technique et supérieur chez Nathan.
Certes, la prescription subsiste sporadiquement dans certaines branches (les filières à concours notamment) et dans certaines générations d'enseignants, dont les plus jeunes qui ont plus que leurs aînés été au contact de cultures universitaires différentes, et d'étudiants devenus plus mobiles. Pour Frédéric Jongen, "la mobilité croissante fait sentir le besoin d'un nivellement, au sens positif du terme, des contenus disciplinaires, et d'un corpus d'informations commun, que peut incarner le manuel". Mais, dans l'ensemble, "la prescription donne lieu à des comportements erratiques, avec des pratiques d'enseignement extrêmement disparates", selon François Gèze, ce qui interdit de compter systématiquement sur elle.
Le comportement de l'étudiant lui-même constitue l'autre problème rencontré par les éditeurs : devant un "encadrement pédagogique insuffisant", pour reprendre les mots de François Gèze, il se tourne vers les ressources libres sur Internet, d'autant que la génération d'étudiants actuelle est la première à avoir eu accès à Internet dès l'enfance. "Les habitudes de recherche d'information, de lecture et d'apprentissage ont changé. Le livre est sorti de leur univers naturel", remarque Florence Martin, directrice de la communication chez Dunod. En ajoutant à cela la baisse globale du pouvoir d'achat estudiantin, mise en évidence par la dernière étude de l'Observatoire de la vie étudiante (voir encadré p.68), on comprend que les ventes chutent.
ADAPTER LES PRIX
Le marché est donc particulièrement sinistré, et l'enquête commandée à Ipsos par le SNE ne laisse plus l'ombre d'un doute sur l'étendue des dégâts, puisque, entre 2006 et 2010, les ventes ont reculé en valeur de 15,3 %, et même de 28 % dans les librairies traditionnelles (voir article p. 71). Au point d'en arriver à un cercle vicieux : "La baisse des ventes incite les libraires à la prudence, donc les commandes et les mises en place sont plus frileuses, donc les ventes baissent", déplore Frédéric Jongen. François Gèze va jusqu'à dire que "certains libraires ont renoncé à faire une rentrée universitaire. Les grands libraires de province se font des cheveux blancs".
Tous les éditeurs s'accordent pourtant à saluer la "confiance » maintenue des libraires envers l'offre éditoriale (voir article p. 74). Et puis ils se prennent à espérer : "On constate une érosion forte mais une stabilisation tendancielle", estime Jean-Christophe Tamisier, le directeur général d'Armand Colin, qui a ressenti moins de difficultés en 2010-2011 que l'année précédente. De même pour Emmanuel Leclerc, chez Lavoisier, "cette année ce n'est pas la catastrophe ; la baisse est plus significative sur les trois dernières années". La stabilisation est également ressentie par La Découverte, Dunod ou Hachette Sup.
Pour faire face à cette érosion des ventes, la première solution est de mettre en place une politique de prix particulièrement adaptée aux ressources des étudiants. Dominique Reymond, directrice de la communication aux PUF, souligne que "le prix unique fixé à 15 € des titres de la collection "Licence" a été maintenu depuis sa création, en septembre 2008". Armand Colin lance cette rentrée la collection "Récap" en histoire, destinée aux étudiants de première année, avec une pagination moindre qu'aux PUF, mais un prix fixé à 10,50 €. L'opération "Chèque-lire" de Dunod, lancée l'année dernière, est reconduite cette année. Son objectif va dans le même sens : tout étudiant ayant indiqué sur Internet son intention d'achat reçoit un bon de réduction à échanger chez le libraire. "Cela permet aussi de renforcer nos liens avec les étudiants comme avec les libraires. De toute façon, on tient toujours compte de la population étudiante visée pour fixer le prix des ouvrages", assure Florence Martin. Cette politique de prix est également appliquée chez Hachette Sup, selon Julie Pelpel-Moulian, responsable éditoriale.
Outre cet effort économique, la solution pour limiter la part de l'occasion peut être de réactualiser le fonds en permanence. "Un ouvrage vit moins longtemps qu'auparavant, et l'étudiant a tendance à recourir à l'occasion, tendance facilitée par la vente en ligne, explique Emmanuel Leclerc. Nous sommes par conséquent dans une course aux nouveautés et aux nouvelles éditions pour contrer le phénomène."
OCCUPER LE TERRAIN
Au-delà, tout le travail éditorial est repensé pour occuper le terrain et séduire de nouveaux publics. La première possibilité est alors de diversifier l'offre en vue de conquérir des segments certes étroits mais peu concurrentiels. Charles Bimbenet souhaite par exemple compléter l'offre de Nathan en expertise comptable avec une collection éponyme sous forme de fiches de révisions. Chez De Boeck, Frédéric Jongen indique sa volonté de "poursuivre l'investigation des niches éditoriales" grâce à une analyse précise des programmes : un partenariat avec l'Institut français du tourisme permettra notamment le lancement, cette rentrée, d'une collection pour les étudiants de ce domaine. Dans la même logique, l'offre est prête pour les aspirants ostéopathes. "Une niche n'est pas un gage de succès, tempère-t-il cependant. C'est un travail vraiment expérimental." "C'est un pari économique à chaque fois", enchaîne Florence Martin, alors que Dunod joue en cette rentrée la carte des études courtes avec la création de la collection "Parcours IUT", secteur sur lequel Nathan avait jusqu'alors un "quasi-monopole" selon Charles Bimbenet.
Aux PUF, on annonce pour mars prochain une nouvelle branche de géopolitique dans la collection "Major", destinée aux élèves de classes préparatoires, un public captif mais "très concurrentiel, » comme le dit Frédéric Jongen, qui s'est penché sur les classes scientifiques ces dernières années.
L'autre possibilité offerte aux éditeurs est de profiter des réformes pédagogiques pour remettre en valeur un fonds ou le développer. Le bachelier frais émoulu, perdu dans les couloirs inconnus et les codes informatiques sibyllins, pourra désormais compter sur de nombreux titres pour se rassurer. Cela passe par des adaptations très simples : "Avec un titre qui reprend l'intitulé de la matière enseignée et une collection désignée par le cursus qu'elle accompagne, l'étudiant s'y retrouve", remarque Emmanuel Leclerc. "Le secret est d'adapter la pédagogie à des élèves qui sortent de terminale", renchérit Charles Bimbenet, qui dit privilégier l'apprentissage par l'exemple et la relecture des manuscrits, dont les auteurs sont universitaires, par des enseignants du secondaire. S'il met en garde contre des "maquettes infantilisantes", il souligne néanmoins que l'effort de mise en page est devenu nécessaire.
La collection "J'intègre" de Dunod, destinée aux prépas scientifiques, a été entièrement rénovée pour offrir des visuels "plus aérés, pédagogiques", selon Florence Martin, sur le modèle des manuels scolaires. De la même façon, chez Hachette Sup, Julie Pelpel-Moulian annonce la refonte de la collection "H Histoire", avec une maquette modernisée et des cartes en couleurs. Armand Colin lance une vaste opération marketing pour la nouvelle formule de la collection "Lettres sup" avec 11 titres à la rentrée, dont des rééditions et des nouveautés. Outre ces modifications formelles, c'est le sujet même des ouvrages qui s'adapte : "Récap", chez Colin, vise l'étudiant de première année, tout comme, chez Bréal, la collection "100 Fiches", plus directement para-universitaire, qui "cible l'entrée de fac", selon les mots de Jérôme Lafeuille, et la collection "Grand amphi", pour le droit, dont 6 titres paraissent fin août.
COMMUNICATION DIRECTE
Le marketing vient alors en renfort, et c'est aussi l'aspect économique qui est privilégié. Armand Colin offre un "Lettres sup" pour deux achetés jusqu'à la fin du mois d'octobre ; Bréal, un fascicule de fonds de cartes pour deux ouvrages de géographie en librairie ; Nathan, pour chaque titre acheté, donne un livre en anglais pour reprendre les bases. «On veut se placer dans un rapport de savoir et non dans un rapport mercantile", souligne Charles Bimbenet. Car la spécificité du marché est là : l'étudiant n'est pas un consommateur lambda, il ne cherche pas les cadeaux mais va au plus utile, et à juste coût. "L'idée d'effet de collection n'est pas pertinente, de même que la mise en place massive en librairie", analyse Julie Pelpel-Moulian. Car comme le dit François Gèze, «les étudiants n'achètent jamais qu'avec l'aval de leurs enseignants". Cela justifie l'effort unilatéral de communication auprès de ces derniers, par mailing, par envoi de catalogues et d'échantillons, plateformes dédiées sur les sites Internet... Sans compter les délégués pédagogiques envoyés dans les écoles, par Dunod ou De Boeck notamment.
Et quand la prescription est malgré tout absente ? Il faut alors imaginer ce que peut être une communication directe et efficace auprès des étudiants. Les bureaux estudiantins sont un relais de choix pour la diffusion du catalogue auprès des étudiants des classes préparatoires. Auprès des universités, c'est plus difficile. Les PUF poursuivent leur partenariat avec la Fage, première fédération étudiante de France, lancé l'an dernier, et Dunod fraternise avec les associations disciplinaires. "C'est un moyen de compléter la prescription", assure Florence Martin. De même qu'au niveau éditorial l'encadrement défaillant de nombre de cursus offre une place vacante pour la communication : les onglets consacrés à telle ou telle discipline fleurissent sur les sites des éditeurs, avec des exercices corrigés (Dunod), une page spéciale pour les prépas distribuant conseils et informations (Bréal), des minisites en tous genres pour ceux qui préparent un concours (Armand Colin)...
On peut enfin considérer l'étudiant comme un "jeune" comme les autres, et le sortir de son cursus pour l'atteindre. Tel est le choix fait par Florence Martin qui lance le 5 septembre un jeu concours, avec 1 000 € et 1 000 prix à la clé : l'étudiant doit réaliser une vidéo mettant en scène un livre Dunod et la poster sur YouTube. Les 1 000 vidéos les mieux évaluées seront sélectionnées fin octobre et départagées par un jury. "Ils ont une culture de l'image qu'il faut mettre à profit, et cela permet de diffuser Dunod sur les réseaux Internet." Pour les toucher, il faut penser jeune, parler jeune, avoir l'air jeune. Ainsi les PUF, qui fêtent leur 90e anniversaire avec des cartes postales et des tee-shirts, mettent en scène de manière humoristique Freud, Gandhi ou Bergson, esthétique seventies à l'appui, autour du slogan : "Le savoir, c'est le pouvoir.""Ce message nous semble particulièrement bien adapté aux jeunes : c'est un appel à la curiosité et à la culture", avance Dominique Reymond. Par ailleurs, la vénérable maison s'apprête à investir Facebook et Twitter, et a créé un poste de communication numérique au sein du service des relations extérieures. Car le jeune tweete, et l'étudiant est jeune.
LE NUMÉRIQUE EN RÉSERVE
Indépendamment de ses vertus en communication, le numérique pose toujours question. Pour filer la métaphore, il est le vent qui peut étendre ou éteindre l'incendie. "Tout est prêt, nos ouvrages sont en ligne, ça fonctionne - mais le marché n'est pas né. Le livre numérique peut exploser ou non", remarque Julie Pelpel-Moulian. Cela vaut pour la plupart des éditeurs : les ouvrages sont en ligne, les contrats sont négociés avec les libraires, tout est en place du point de vue technique - on n'attend plus que les étudiants. "Il n'y a pas d'enthousiasme, mais cela fait toujours de nouveaux lecteurs", pondère Florence Martin, résolument optimiste. De Boeck aura lancé les 500 premiers ouvrages au format XML (un PDF évolué permettant d'harmoniser la mise en page avec le format de la tablette de lecture, NDLR) d'ici à la fin de l'année. "Mais la prudence est de mise : on n'est pas sûr que pour les manuels, par exemple, la prescription serait la même sur un format numérique, à cause de l'équipement des écoles", souligne Frédéric Jongen.
"Je crois toujours au format papier", renchérit Jérôme Lafeuille, chez Bréal, à l'unisson de ses confrères. Les PUF et La Découverte se déclarent tous deux satisfaits de la présence des "Que sais-je ?" pour l'un, des "Repères" et de l'encyclopédie L'état du monde pour l'autre, sur la plateforme Cairn.info : là ne se posent pas les questions délicates d'équilibre du budget (voir article p. 80). Certains éditeurs proposent déjà une offre éditoriale uniquement numérique, tel Lavoisier, qui a lancé au début de l'été une encyclopédie de médecine sous forme d'application iPhone. "Nous sommes assez satisfaits, malgré les vacances, c'est un gros travail éditorial supplémentaire qui est déjà rentabilisé. La rentrée va nous servir de test..." se réjouit Emmanuel Leclerc.
Mais la force du numérique n'est peut-être pas où on l'attend : La Découverte et Armand Colin ont décidé de numériser la partie épuisée de leur fonds. "Les petites ventes qui ne justifiaient plus de réimpressions sont remises dans le catalogue via le numérique, explique Jean-Claude Tamisier, et diffusées par un système d'impression à la demande. Cela permet de récupérer le passé éditorial et de redonner un avenir à chacun de nos titres. Le numérique est parfait pour gérer la confidentialité."
Le livre universitaire
Le SNE en campagne
Le groupe des éditeurs universitaires du Syndicat national de l'édition conçoit l'étude qu'il a commandée à Ipsos sur l'évolution du marché du livre universitaire comme un outil à la fois pédagogique et politique pour obtenir la mise en place d'un "Chèque-livre sup".
C'est la première fois qu'on dispose d'une telle enquête, et elle mérite qu'on s'y attarde", insiste Florence Martin. La directrice de la communication de Dunod est à l'origine, en 2009, du projet du "Chèque-livre sup", vers lequel tend l'enquête sur l'évolution du marché du livre universitaire commandée à Ipsos par le groupe des éditeurs universitaires du Syndicat national de l'édition (SNE), qui en a rendu publics les résultats ce mois-ci (voir p. 72). "Les remontées des éditeurs et des libraires étaient devenues très préoccupantes, se souvient François Gèze, P-DG de La Découverte et président du groupe. Sauramps, à Montpellier, avait été la première librairie à tirer la sonnette d'alarme. »"Le fonds numérisé ne semblait pas vouloir décoller à l'université, précise Florence Martin. La question devenait donc pressante : comment replacer le livre au centre des préoccupations des étudiants ? Et comment reconstituer le cercle vertueux enseignant-étudiant-libraire ?"
SUBVENTION
C'est dans cette perspective que l'idée d'un Chèque-livre sup a émergé. Sur le modèle de ce qui est fait dans le secondaire, il consisterait en une subvention pour les étudiants de licence, de façon à "les ramener à la librairie", comme le dit Florence Martin. Et donc à "ramener les enseignants à la prescription : ils ne prescrivent pas parce qu'ils sont très sensibles au prix du livre, et ne veulent pas avoir le sentiment de se placer dans un rapport commercial avec leurs étudiants". Au-delà de sa dimension économique, le projet comporte aussi un enjeu pédagogique. "On s'était déjà rendu compte au moment de l'apparition massive des services de reprographie dans les facs [au début des années 1980, NDLR] que cette pratique fabriquait une sorte de zapping pédagogique, puisque l'étudiant perdait l'habitude de travailler avec un ouvrage complet", rappelle François Gèze. Ici, le problème est du même ordre car, comme le formule Florence Martin, "on ne retient pas la même chose à l'écrit qu'à l'écran. Consulter Wikipédia, c'est pratique, mais c'est un contenu privé de démarche éditoriale comme de démarche pédagogique".
Restait donc à convaincre les institutions compétentes de la nécessité d'une action budgétaire. Cela s'est révélé compliqué. "Nous avons pris un premier contact avec les conseils régionaux et le ministère, raconte François Gèze. Tout le monde trouvait l'idée très bonne, personne ne disait non. Mais personne ne voulait payer. A part auprès des bibliothèques universitaires, qui sont notre meilleur allié de terrain, on avait un peu l'impression de prêcher dans le désert." Le besoin d'une étude concrète et précise du marché s'est alors fait sentir. Le travail préparatoire a été long et délicat. "Le plus difficile a été de définir le corpus. Nous voulions prendre en compte exclusivement les ouvrages de formation destinés aux étudiants de bac + 1 à bac + 5», poursuit-il. "Nous avons tout de suite décidé d'exclure les codes juridiques, qui sont aussi destinés aux professionnels. De tels volumes de vente auraient biaisé l'analyse, ajoute Florence Martin. Pour le reste, nous nous sommes servis des entrées de recherche de la base Electre : à défaut d'une fiabilité à 100 %, elles permettent un référencement délivré par un organisme neutre et indépendant." L'étude a été lancée en février 2011. "Si les critères en sont peut-être trop systématiques, les données absolues qu'elle dégage, sur l'évolution du marché, restent tout à fait valables, puisque le panel et le corpus sont stables", souligne François Gèze.
Principale conclusion : le marché est sinistré. "Je suis surpris surtout par l'homogénéité des situations des éditeurs, glisse le président du groupe. Tous font les mêmes efforts éditoriaux et commerciaux, tous s'adaptent à l'évolution comme ils peuvent, et tous récoltent le même résultat. Il faut agir maintenant." Du coup, l'étude doit servir de fer de lance pour l'action à mener. "Elle offre une meilleure visibilité globale du marché : le résultat est clair et concret, souligne-t-il. Elle permet d'apporter quelque chose de tangible à nos interlocuteurs, souvent réceptifs mais très ignorants."
LOBBYING
Quelle stratégie, donc, pour la suite ? "Nous allons retourner vers les institutions, annonce Florence Martin. Comme nous les avons déjà rencontrées, ce sera sans doute plus facile. Moi, j'ai des méthodes qui relèvent du marketing. Mais François Gèze nous a orientés vers un lobbying de fond.""Il faut jouer au niveau politique, estime le président du groupe des éditeurs universitaires du SNE. Le ministère n'a pas d'argent et utilise toutes les arguties pour nous rouler dans la farine. Nous sommes en période préélectorale, il nous reste six mois pour sensibiliser non seulement les Régions, mais aussi les députés, les partis politiques... C'est un sujet bien perçu, et le projet peut être facteur d'attractivité régionale." Le SNE entend démonter sa combativité dans cette bataille. "Il doit y avoir deux mots d'ordre pour les étudiants : la connaissance et la réussite, martèle Florence Martin. Le livre est au centre : en favoriser l'accès, c'est aussi oeuvrer pour l'égalité des chances." Les chances des étudiants, des libraires et des éditeurs.
Libraires, diffuseurs, solidarité !
La crise conduit les libraires universitaires et les représentants à repenser leur rôle et leur mode de fonctionnement. En pleine coopération.
Les librairies traditionnelles sont les plus touchées par la baisse globale des ventes de livres d'enseignement supérieur. Si elles restent, de loin, le premier canal de distribution pour ce secteur, leur part de marché a souffert du recours de plus en plus massif à l'achat en ligne, comme le révèle l'enquête Ipsos/SNE (voir p. 71). "Le marché d'occasion a connu un nouvel essor grâce aux sites dédiés ; la conséquence en a été une évolution assez forte il y a deux ou trois ans », analyse Daniel Cousinard, gérant de la librairie Durance à Nantes. Jean-Marie Sevestre, P-DG de la librairie Sauramps à Montpellier, n'hésite pas à qualifier cette évolution de "dégringolade ». Et les deux libraires s'accordent sur un terme - qui semble être devenu le mot d'ordre du libraire universitaire, spécialisé ou non - : la "prudence ».
Cette prudence n'implique pas fortement une baisse des commandes et des mises en place, mais bien plutôt une réflexion de fond sur la stratégie à adopter face à une université "qui souffre", comme le dit Philippe Nani, directeur commercial pour le segment droit, gestion et sciences humaines chez UP Diffusion, qui diffuse entre autres les publications de Dunod, Dalloz, Armand Colin et Masson. Cette souffrance se traduit par la baisse globale de la prescription par les enseignants, que les libraires ont parfois du mal à atteindre.
DÉSAPPOINTEMENT
"Les relations directes entre éditeurs et enseignants ont beaucoup diminué sur les dix dernières années, déplore Jean-Marie Sevestre. Aujourd'hui, les enseignants sont désappointés par la baisse des ventes et semblent commencer à prendre conscience de la nécessité du changement. Il faut absolument qu'on arrive à dialoguer avec les universitaires. » Ceux-ci restent capables de faire entrer les étudiants dans une librairie : "Il y a trop d'ouvrages proposés pour qu'un étudiant s'y retrouve tout seul », commente Lyla Aït-Menguellet, codirectrice de la librairie universitaire Meurat, spécialisée dans les sciences humaines, à Lille, et elle-même ancienne universitaire.
C'est donc vers les enseignants qu'il faut communiquer en premier lieu, et c'est eux qu'il faut faire venir en librairie. A Montpellier, Sauramps est le cadre de débats mensuels depuis un an et demi environ, dans lesquels les intervenants sont les professeurs eux-mêmes. La librairie Meurat multiplie aussi les conférences et rencontres dans ses murs. La baisse de la prescription enseignante place aussi le libraire dans la position de l'interlocuteur privilégié de l'étudiant. "Le libraire a un rôle de conseil extrêmement important », souligne Christophe Jeancourt-Galignani, directeur commercial des Puf.
Les éditeurs s'accordent à considérer que la communication promotionnelle, sous forme de cadeaux divers, a peu d'impact sur une clientèle qui n'a pas une attitude de consommation spontanée, mais plutôt un contact de plus en plus épisodique avec les livres, tandis que son porte-monnaie est bien entamé par les autres dépenses (voir encadré p. 68). Aussi les libraires préfèrent-ils miser sur une démarche pédagogique à l'égard des étudiants. Pour Lyla Aït-Menguellet, "la promotion massive par les éditeurs ne fonctionne que si elle est précisément ciblée. Les étudiants ne s'intéressent pas aux collections mais au contenu de tel ou tel ouvrage. Ils se moquent de recevoir un titre gratuit pour deux titres achetés. » C'est ainsi le dialogue avec le libraire qui va guider l'achat. "Le fait d'avoir un échange sur le contenu de tel ou tel ouvrage fait comprendre à l'étudiant que les indications du professeur n'ont pas été données au hasard. Cela les met en face d'un choix intellectuel et, du coup, cela éveille leur attention. » "On ne peut pas communiquer efficacement sur la forme, c'est sur le fond que l'on peut convaincre un client étudiant", renchérit, à la librairie Durance, à Nantes, Daniel Cousinard.
RAPIDITÉ, EFFICACITÉ
Ce rôle de conseil a bien été pris en compte par les diffuseurs. Mais la librairie doit ensuite apparaître comme le point de vente le plus rapide et le plus efficace, et donc assurer une gestion optimale des stocks et du réassort. Pour une librairie spécialisée comme Meurat, "la rentrée est une période cruciale ». Une librairie généraliste comme Privat-Guerlin, à Reims, le ressent aussi. "Pour contrer la vente en ligne, il faut que l'étudiant soit très vite fourni, explique Aurélien Ledoux, coresponsable du rayon universitaire. Cela nécessite d'avoir un stock très important sur un moment comme la rentrée."
Faut-il dès lors commander beaucoup pour vendre peu ? "Oui, nous restons sur le même niveau de commande que l'année précédente, répond sans hésiter Daniel Cousinard, à Nantes. Parce que nous sommes optimistes et que nous ne devançons jamais une baisse. » Le défi est de taille pour les représentants. "Les libraires essaient de minimiser leur stock, qu'ils gèrent quasiment en flux tendu, constate Christophe Jeancourt-Galignani. Du coup, au lieu de négocier une simple mise en place, le représentant est devenu une sorte de cogestionnaire du rayon en librairie, qu'il suit de très près pour pouvoir garantir un réassort immédiat." >Le directeur commercial des Puf a même proposé un cycle de formation à ses équipes pour adapter leurs propositions à ce nouveau contexte. Cela passe aussi par une connaissance précise d'un réseau très divers : "Les grands libraires considèrent toujours que c'est un marché attractif, parce qu'ils ont un stock et une clientèle solides, explique Philippe Nani. La difficulté est pour les plus petits, et pour ceux qui sont moins spécialisés. »
Christophe Jeancourt-Galignani observe lui aussi une tendance à la "concentration » sur les gros points de vente. "Cela signifie qu'il faut penser l'offre commerciale et l'adapter en fonction de la cartographie des écoles et des programmes que nous mettons à jour chaque année, de façon à toucher les petites librairies proches d'antennes universitaires, comme à Melun ou Lorient. » Comme le résume Charles Bimbenet, directeur du département supérieur chez Nathan, "les libraires sont ceux qui sont au plus près de la demande ; ils connaissent leur bassin pédagogique par coeur et garantissent le maillage de la distribution ».
CONFIANCE
Pour Daniel Cousinard, « éditeurs ou libraires, on garde tous un rôle à jouer, et on a le livre à défendre ». La relation au sein de la chaîne du livre universitaire est plus solidaire que jamais, et la confiance n'est pas entamée. "Les nouveautés sont systématiquement intégrées à nos rayons », signale-t-il. Chez Sauramps, à Montpellier, Jean-Marie Sevestre confirme : "On doit présenter les nouvelles collections. » Même si, comme le rappelle Philippe Nani, "tous les éditeurs ont élargi leurs offres, de l'entrée de gamme jusqu'à l'ouvrage complet ».
Chez les libraires moins spécialisés, cette confiance s'accompagne toutefois d'une prudence redoublée. "On tente les nouvelles collections, admet Aurélien Ledoux, chez Privat-Guerlin, mais on commande toujours en fonction des programmes. » Pour les petites librairies, même spécialisées, cela représente un effort. "Nous faisons toujours une place aux nouvelles collections, mais c'est très difficile de leur donner leur chance », rappelle Lyla Aït-Menguellet chez Meurat, à Lille.
Dans l'ensemble, le secteur se veut pourtant résolument confiant. "Les libraires nous suivent. Il n'y a aucune désaffection de leur part », estime Christophe Jeancourt-Galignani, qui assure à l'inverse : "Nous sommes très conscients de ce qu'est une trésorerie de librairie." Et il précise : "A défaut de faire des promotions à la commande, comme peuvent seuls se le permettre les grands groupes, nous ne demandons le règlement des livres qu'une fois qu'ils auront été vendus. » Objectif ? Maintenir la "sérénité » des libraires. Ceux-ci en ont, en effet, plus besoin que jamais.
Cairn élargit son offre
Partenaire numérique de près de 600 institutions francophones dans le monde, la plateforme de distribution en ligne créée en 2005 par 4 éditeurs universitaires pour leurs revues s'est ouverte aux collections de référence, aux ouvrages collectifs et, désormais, aux monographies de recherche de 80 éditeurs.
Directeur de Cairn.info, Marc Minon a annoncé lors du congrès annuel de l'Association des directeurs de bibliothèques universitaires (ADBU), du 15 au 17 septembre à Vannes, son renforcement à plusieurs niveaux (voir p. 55). La plateforme de distribution numérique créée en 2005 par quatre éditeurs universitaires bénéficiera de nouvelles fonctionnalités de recherche, d'une extension de son activité internationale et d'une ouverture à de nouveaux éditeurs et supports qui consacrent la position qu'elle a acquise.
Il y a six ans, l'initiative de De Boeck, Erès, Belin et La Découverte répondait au constat de l'érosion de leurs ventes en librairie. "J'étais alors chercheur et je réfléchissais aux différentes hypothèses d'utilisation du numérique par De Boeck », >se souvient Marc Minon, à qui revient l'idée originale du projet, à savoir la mise en ligne des revues des éditeurs fondateurs. Ce point de départ était "techniquement plus facile, puisque les revues proposaient des articles déjà indexés, rappelle-t-il. En outre, ce format était de loin le plus affaibli puisqu'il avait quasiment disparu des librairies, et que les habitudes de lecture s'étaient déjà modifiées au contact d'Internet, au point que la consultation en bibliothèque en était diminuée. Le discours d'impact de plus en plus répandu, menaçant jusqu'à l'idée même de continuer les revues, il y avait urgence."
Dès 2009, cependant, le site s'ouvre aux ouvrages collectifs et aux collections de référence : "Que sais-je ?" d'abord, puis "Repères" l'année suivante. Rien ne semble l'arrêter. La force de Cairn.info n'a pas changé depuis : c'est celle de convaincre tous les acteurs, en tenant compte des besoins et des gains de chacun. Pour les bibliothèques, l'avantage est évident : une fois abonnées au bouquet de revues de leur choix, elles y accèdent librement, et peuvent le mettre à disposition de tout leur réseau. Six cents institutions, dont 230 en France, utilisent désormais les services du portail. "Dans l'ensemble des pays occidentaux francophones, seules deux universités n'ont pas souscrit à Cairn.info », se réjouit son directeur.
Un nouveau chantier est d'ores et déjà lancé : la traduction d'une sélection d'articles avec l'aide du CNL, de façon à proposer une vitrine de la recherche francophone dans d'autres bassins linguistiques. Trois cents institutions sont concernées, en Amérique du Nord et en Asie notamment. La plateforme propose aussi une consultation à la demande pour les particuliers, les articles les plus anciens (environ la moitié) étant en accès gratuit.
CONVERSION
Comme le CNL a lui aussi été convaincu dès le départ du bien-fondé de l'entreprise, les aides à la conversion rétrospective des numéros anciens des catalogues ont permis de mettre en ligne, à l'heure actuelle, un total de 300 revues au complet, soit 130 000 articles au total. Grâce à un nouveau moteur de recherche, l'usager se verra désormais offrir la possibilité d'une veille RSS sur le sujet qui l'intéresse, de recommandations de documents traitant de questions similaires, et d'un référencement de toutes les citations du document qu'il consulte dans d'autres ouvrages, qu'ils soient ou non disponibles sur Cairn.info.
Les éditeurs aussi ont compris l'intérêt qu'ils avaient à préférer Cairn.info aux plateformes concurrentes, telles que Google : l'entreprise a en effet à coeur de proposer des offres extrêmement incitatives. "Tous les éditeurs, 80 au total, sont traités de la même façon ; notre objectif est de mettre en place un système de rémunération qui permette de compenser le risque de cannibalisation du support papier, inhérent à la numérisation. » Concrètement, Cairn.info prend une commission de 25 % pour les ouvrages, et de 33 % pour les revues. Cette commission est prélevée sur une somme qui tient compte de la part de chaque éditeur dans le bouquet, mais surtout de la consultation de chaque titre. "Il faut que les ayants droit puissent être rémunérés comme ils le seraient en termes de vente. D'autre part, cette politique de rémunération a pour but d'inciter les éditeurs à proposer aussi leurs titres phares sans crainte d'y perdre", >explique Marc Minon, qui souligne que ce système offre le taux de rémunération le plus élevé du secteur. Les éditeurs se voient également offrir des services de numérisation, de suivi de fabrication et, depuis cette année, un outil de gestion et de suivi des manuscrits permettant aux comités éditoriaux de préparer les numéros en ligne. Aucun éditeur n'a quitté Cairn.info depuis le lancement de la plateforme. Cette année, Minuit va rejoindre l'aventure, et la collaboration avec Le Seuil, L'Harmattan et EDP Sciences sera développée systématiquement.
"Nous sommes un service documentaire, nous ne voulons pas devenir une librairie numérique », insiste le directeur, en soulignant qu'aucun titre n'est disponible dans son intégralité à la vente aux particuliers, et que l'équipe ne travaillera pas en direction des ebooks pour ne pas concurrencer les librairies. Une ambition purement philanthropique alors, qui vient donner un nouveau souffle à un secteur fatigué ? Non. Le bénéfice est là. Ce qui n'empêche pas l'ambition de se porter ailleurs : « Nous voulons devenir une bibliothèque », indique Marc Minon. Il vise 20 000 titres de monographies de recherche disponibles dans les cinq prochaines années, dont les 2 000 premiers au début de 2012.
Un nouveau souffle pour les presses d'université
Avec 28 éditeurs fédérés pour leur diffusion et leur distribution, l'AFPU-D contribue à la professionnalisation de tout un pan de l'édition de recherche.
Au départ, nous étions 8 presses universitaires à nous fédérer, avec l'idée que la diffusion des ouvrages de recherche devait être assurée par un réseau de représentants spécifiques et qui n'auraient que cela à défendre, se rappelle Pierre Corbel, président des Presses universitaires de Rennes et de l'Association française des presses d'université-Diffusion (AFPU-D). Car si ces livres sont diffusés en même temps que ceux des éditeurs commerciaux, ils sont sacrifiés." Tel était donc le pari : se regrouper pour favoriser le placement du livre de recherche en librairie, et en assurer la distribution commune.
Aujourd'hui, ce sont 28 éditeurs universitaires qui sont affiliés à l'AFPU-D, avec une diffusion de 2 000 titres par an. Dès le départ, 4 représentants se sont partagé le territoire. La distribution, initialement assurée par Distique, revient depuis 1998 à la Sodis et à Gallimard-export pour l'étranger. "Nous serons toujours redevables à André Imbaud [P-DG de la Sodis jusqu'en 2007, NDLR] d'avoir accepté de nous diffuser, avec les difficultés qu'implique un consortium de 28 éditeurs, avec des tirages et des ventes au compte-gouttes », souligne le président. D'autant que le fait d'être distribué par un groupe tel que Gallimard a contribué à faire évoluer le travail des presses universitaires. "Cela nous a professionnalisés, se félicite Sophie Linon-Chapon, vice-présidente de l'association et responsable éditoriale aux Presses universitaires de Paris-Sorbonne. Il nous a fallu nous tenir au rythme de l'office, respecter le planning de commercialisation... »
PEU DE RETOURS
La progression du chiffre d'affaires brut est depuis constante, pour atteindre 5 millions d'euros cette année... même si la vente au titre reste stable. "Cela facilite aussi grandement le travail des libraires et les encourage à passer commande », souligne Pierre Corbel, en précisant que la mise en place est décidée entre le représentant et le libraire. Celle-ci, prudente (200 exemplaires en moyenne hors manuels), permet aussi un taux de retour très bas (19 %) : "Cela ne sert à rien d'imposer des piles d'exemplaires aux libraires. Ce qui compte, c'est qu'ils aient envie de prendre un risque, de miser sur la diversité. C'est parce qu'ils font ce pari que le livre universitaire est toujours vivant. Sans cela, il serait condamné à mourir étouffé dans le réseau du bouche-à-oreille des chercheurs, qui commandent de toute façon sur Amazon. On compte beaucoup sur les libraires, c'est leur travail qui fait vivre la recherche dans l'espace public. »
Pour les presses d'université, être diffusé par l'AFPU-D est donc une chance. "Mais les conditions d'affiliation sont plus strictes aujourd'hui qu'au départ, puisque nous sommes déjà nombreux", avertit Sophie Linon-Chipon. Elle met aussi en avant la dynamique qu'impulse l'association à ses éditeurs : des journées de formation et des ateliers sont organisés pour professionnaliser des équipes parfois "issues des services de reproduction des facs ». L'émulation est aussi très importante, et certaines presses émergent dans le catalogue, pour aller rejoindre le "peloton de tête » constitué par les presses fondatrices.
Ces dernières ont bien profité du développement permis par ce système fédéral : les PUR (Rennes) offrent ainsi plus de 220 titres par an, en regroupant plusieurs pôles universitaires de l'Ouest, et les PUPS 70. Néanmoins, beaucoup de choses peuvent être améliorées. Pour Sophie Linon-Chipon, il est par exemple indispensable de développer collégialement l'activité des éditeurs universitaires. Et de prendre l'exemple de Paris : "On fait rire la terre entière en séparant les PUPS, les Presses de la Sorbonne nouvelle et les Publications de la Sorbonne. Un seul pôle serait d'une puissance inouïe !"
SALONS
Les projets sont nombreux, dont le développement de la communication en étant davantage présent sur les salons. L'AFPU-D participe notamment à la manifestation Les Rendez-vous de l'Histoire de Blois, où elle organise des conférences, des débats, des rencontres d'auteurs. Mais Sophie Linon-Chipon voit plus loin avec le projet d'"un stand au salon d'Abu Dhabi en 2012". On n'arrête pas l'esprit d'initiative de celle qui est aussi maître de conférences en lettres à la Sorbonne et qui a créé le site Afpu-d.fr en 2009. "Ce n'est encore qu'un portail, note-t-elle. L'objectif initial était de proposer un catalogue par mots-clés qui redirige vers les sites de chaque éditeur pour les commandes, de façon à permettre aux libraires de préparer une vitrine ou un stand. » Mais la mise en ligne de l'intégralité de tous les catalogues, en remontant aux parutions antérieures à la création du site, est désormais en chantier. "Et puis on mettra en place un module qui permettra aux professionnels de commander directement en ligne », promet-elle.
L'association ne compte qu'une seule salariée, la responsable administrative et financière. Les représentants sont payés en fonction des mises en place, et tous les autres sont bénévoles. Mais l'énergie est pourtant palpable. Normal, pour Sophie Linon-Chipon : "Individuellement, nous sommes trop petits, ou pas assez rentables pour négocier avec un distributeur. Là, nous avons les moyens de mettre en valeur notre travail. On est sur une niche éditoriale. Nous n'avons pas à vulgariser, mais à proposer des livres complets, beaux. Notre entreprise est fragile, comme toutes, mais nous proposons quelque chose que nous sommes les seuls à savoir faire." L'union fait non seulement la force, mais aussi la bonne humeur.