C’est le « régional de l’étape » qui, une fois de plus, a été le plus gros vendeur de livres lors de la dernière Foire du livre de Brive, du 8 au 10 novembre. Caché derrière une montagne de livres sur le stand Albin Michel, le romancier Christian Signol a dédicacé à la chaîne et vendu 1 300 exemplaires, soit le double des autres meilleures ventes du salon réalisées par Amélie Nothomb, Michel Drucker et Pierre Lemaitre - tout juste auréolé de son prix Goncourt. Car Brive, qui s’est dotée d’une belle programmation culturelle avec débats et conférences, recevait cette année tous les lauréats des prix de l’automne attribués avant la foire, accueillant donc aussi Yann Moix, Léonora Miano et Christophe Ono-dit-Biot. Yannick Gazeau, représentant l’ensemble des libraires tenant les stands, mentionne aussi le succès en jeunesse d’Antoon Krings et de Zep. «Nous sommes encore en train d’affiner les chiffres, mais l’édition 2013 devrait être une année record, précise-t-il. Cette manifestation est un remède à la crise actuelle de la librairie.»
Si les romanciers de la rentrée et les stars des médias ont été au centre de l’attention des visiteurs, le roman régionaliste, avec l’école de Brive et ses successeurs, n’a donc pas dit son dernier mot. Les stands des Presses de la Cité, de De Borée ou de Calmann-Lévy, principaux éditeurs du rayon, ont vu les lecteurs affluer. Se teintant d’intrigues policières, d’histoires de femmes ou de romances, le genre a évolué et fait émerger des écrivains qui ne sont plus cantonnés au genre du terroir. Certes, à la librairie Culture évasion de Brive, le rayon tourne moins car « le lectorat vieillit et les jeunes se tournent plus vers le polar ou le fantastique », mais dans un marché dégradé, il reste un secteur sain, avec peu de retours. « Le roman régionaliste continue de se vendre en librairie ainsi que dans les réseaux France Loisirs et Grand livre du mois », explique Jeannine Balland qui dirige la collection «France de toujours et d’aujourd’hui». « Au départ, ce qui plaisait, c’était de parler des métiers anciens, mais aujourd’hui il faut une intrigue plus nourrie avec des histoires de famille, toujours ancrée dans une région. » Si ce genre reste un marché de grands formats pour des lectrices d’un certain âge, l’éditrice de Jean-Paul Malaval ou d’Antonin Malroux affirme que la dernière étude de lectorat montre l’arrivée de quadragénaires «attachés aux valeurs que véhicule cette littérature, commela solidarité, et qui sont un peu oubliées aujourd’hui dans notre société.»
Anne-Laure Walter