Avant-critiques Mémoires

Enzo Ferrari, "Le vertige de la vitesse. Mémoires" (Séguier)

Enzo Ferrari lors de la onzième édition de la Targa Florio en 1920. - Photo © Photo12

Enzo Ferrari, "Le vertige de la vitesse. Mémoires" (Séguier)

Parus initialement en 1964, les mémoires d'Enzo Ferrari sont réédités : une saga de bruit et de fureur.

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Par Olivier Mony
Créé le 05.05.2024 à 11h00

Rouge passion. Bien sûr, il y a les parfums, la haute couture, les montres, la joaillerie et tout le bataclan. Tout de même, pour l'enfant occidental né après la guerre, l'industrie du luxe s'incarne d'abord dans l'objet qui peut apparaître comme le plus désirable qui soit : une voiture. Une voiture rouge, frappée de l'emblème d'un petit cheval noir cabré, qui file à toute allure sur les routes et les circuits du monde. Une Ferrari et rien d'autre. Là où l'industrie, justement, cède sa place à l'art, fût-il le plus profane. Comme dans ce film, Ferrari, récemment sur nos écrans (de télé) où Michael Mann contribue au denier du culte des voitures rouges et de leur créateur, le « Commendatore », Enzo Ferrari.

Les éditions Séguier, à qui rien de ce qui participe à l'élaboration de nos mythologies modernes n'est tout à fait étranger, rééditent les mémoires, introuvables depuis fort longtemps, de l'homme de Maranello, épicentre de l'empire. Initialement parus en 1964 sous le titre Mes joies terribles, les revoici désormais, intitulés Le vertige de la vitesse. Le sport automobile a curieusement peu fait l'objet d'investigations dans le champ littéraire (deux livres de Jean-Philippe Domecq, un de Bernard Chambaz, un Remarque oubliable, quelques lignes chez Leiris...). Précisons d'emblée qu'il n'est pas vraiment question ici de littérature. Mais tout de même d'une saga. Celle d'un homme parti de rien ou pas grand-chose et qui ne concevait de franchir la ligne d'arrivée autrement que premier. Lorsqu'il publie ses mémoires, il reste encore à Ferrari vingt-quatre ans à vivre. De nombreuses échappées belles sont donc encore à venir, mais, pour l'essentiel, la légende est déjà écrite. Ce qui frappe d'abord, à la lecture de ces pages où Ferrari avoue en passant que son désir premier aurait été d'être chanteur d'opéra, c'est le parfum de mort qui en est imprégné. Sa vie sera tout de même un opéra, mais macabre. Une cérémonie des adieux et un deuil permanent. Tant de pilotes d'abord (Ascari père et fils, Musso, Von Trips, De Portago, Castellotti...) tombés au champ d'honneur de la vitesse et surtout son fils Dino, brillant jeune ingénieur, emporté en pleine jeunesse par une maladie foudroyante. Ferrari évoque cela avec un stoïcisme dont il ne se départit jamais. Après tout, le dimanche suivant, une autre course l'attendait.

Enzo Ferrari
Le vertige de la vitesse. Mémoires
Séguier
Tirage: 2 000 ex.
Prix: 21 € ; 224 p.
ISBN: 9782840499794

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