En mettant il y a trente ans le savoir en images au format poche avec la collection "Découvertes", l’une de celles qui ont le plus marqué l’histoire de l’édition française contemporaine, Pierre Marchand a montré de manière éclatante le pouvoir du visuel dans les livres, aussi bien que - et c’est sans doute le plus important - le pouvoir des livres sur le terrain en constante démultiplication de l’image. La collection de Gallimard n’est plus développée aujourd’hui du fait du succès des services encyclopédiques concurrents offerts par Internet. Mais reste cette capacité avérée du livre à "faire image", bien utile aujourd’hui où celle-ci s’est répandue dans tous les pores de la société.
D’ailleurs, contre toute attente, Instagram, le plus visuel des réseaux sociaux, est en train de s’imposer comme un petit paradis pour le livre, même lorsqu’il ne contient que du texte. Des blogueurs et blogueuses spécialisés y ont migré pour livrer en images, mais aussi en mots, leurs conseils et leurs coups de cœur. En une petite poignée d’années, ces "bookstagrameurs" qui sont surtout des "bookstagrameuses" ont bâti un solide écosystème de prescription littéraire, désormais prolongé par une fonction "shopping". Les éditeurs l’ont bien repéré, dont plusieurs ont établi de véritables stratégies communautaires sur le réseau. Des libraires en ont également fait un relais de notoriété et le vecteur d’un nouveau style de relation avec leur clientèle.
Car en librairie aussi l’image est devenue essentielle. L’irruption du design et plus largement d’une conception exigeante de l’aménagement des magasins est la première des mutations dans la librairie sur lesquelles Livres Hebdo va enquêter pendant quatre semaines. Avant d’inviter ses lecteurs à découvrir les stragégies d’innovation de quatre libraires dans le cadre de son prochain "LH Forum", le 6 juin à Paris.