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Sceptique

“Je suis sceptique. Soyons honnêtes : en sciences humaines à l’université, d’une part les étudiants n’ont pas le niveau pour suivre des cours en anglais, d’autre part l’enseignement de ces disciplines accorde l’importance à la langue française. La situation est différente dans les écoles de commerce où les étudiants sont plus à l’aise et où les auteurs anglo-saxons correspondent bien aux enseignements. En sciences humaines, nous n’avons pas les auteurs capables d’écrire directement en anglais et je pense que ça se traduirait très vite par un appauvrissement de la pensée. On le voit avec des auteurs allemands ou néerlandais. Ce n’est pas du conservatisme, car nous menons des projets bilingues. Par exemple, le prochain numéro de la revue Annales historiques de la Révolution française sera bilingue français-anglais. En sciences humaines, c’est le monde des revues qui donne le nouveau tempo, mais les chercheurs sont davantage concernés que les étudiants. Pour donner une visibilité internationale à la pensée française, nous participons à la traduction en anglais d’articles de revues sur Cairn.info, soutenue par le CNL. Dans l’état actuel de la production du savoir, il me semble que les projets de traduction sont plus pertinents que la production directement en anglais.?

Stéphane Bureau, directeur délégué à l’édition d’Armand Colin

Pragmatique

“S’il s’avérait qu’un marché existe en langue anglaise sur la France, il n’y aurait aucune raison pour que l’on ne publie pas directement en anglais. Mais encore faut-il qu’il y ait un marché. Aujourd’hui, nous, éditeurs, ne rentrons pas dans le débat institutionnel sur le sujet de l’enseignement en anglais à l’université. Nous regardons les choses d’un point de vue marketing. Or ce marché est tout petit en France. Nous faisons des efforts sur ce créneau et nous avons déjà quelques publications en anglais pour des matières où cela est possible comme les sciences dures et le management. Mais aujourd’hui, cela reste des cas particuliers.?

Florence Martin, directrice de la communication de Dunod

Plutôt contre

“Nous sommes plutôt partisans de la défense de la langue française, et j’ai l’impression que ce projet n’y contribue pas, même si les universitaires avec lesquels nous échangeons nous disent que cela peut attirer des étudiants étrangers qui seront bien obligés d’apprendre le français une fois sur place. Pour le moment, la publication directement en anglais n’est pas une orientation que l’on envisage, même s’il nous est arrivé de publier quelques ouvrages en anglais. Mais si des thèmes n’existent pas en français, il vaut mieux traduire. Nous n’avons pas le savoir-faire. Pour le moment, même la Revue internationale de psychologie sociale que nous publions est en français. Nous avons testé quelques ouvrages bilingues en psychopathologie, sans noter d’envolée particulière… Nous avons même senti une réticence des libraires.?

Sylvie Bigot, présidente du directoire des Presses universitaires de Grenoble

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