Quand Louis XIV promulgue en 1714 un édit accordant le titre de « Prince du sang » à ses enfants naturels le duc du Maine et le comte de Toulouse, nés de sa relation adultérine avec Madame de Montespan, il n'a pas seulement déclaré une volonté testamentaire mais aussi posé un acte constitutionnel. Anticonstitutionnel ! s'écrient les princes du sang légitimes et autres ducs et pairs offusqués, tel Saint-Simon. L'édit de Marly, que confirme quelques mois avant sa mort une nouvelle déclaration du souverain, bouleverse en effet la loi fondamentale du royaume. Les bâtards royaux dament le pion aux cousins du roi dans l'ordre de succession. Agissant selon son bon vouloir, Louis XIV s'est comporté en testataire privé. Le caprice, fût-il royal, n'a pas servi la couronne. Comme quoi, l'absolutisme n'est pas toujours le meilleur allié de la monarchie... La décision du Roi-Soleil d'élever ses bâtards au rang d'héritiers présomptifs introduit une forme d'insécurité juridique : s'il n'existe plus de véritable différence entre les rejetons du roi nés d'une union sanctifiée par l'Église et ceux qui le sont hors mariage, chacun ne pourra-t-il alors prétendre au trône ? Ne sera-ce pas la zizanie assurée, voire la guerre civile à la disparition du monarque ? Or la loi salique, considérée dès la fin du Moyen Âge comme socle constitutionnel de la royauté française, impose très clairement la règle de la primogéniture masculine : c'est à l'aîné mâle issu d'une union légitime que se transmet le sceptre. Ainsi le très catholique Henri III qui avait succédé à ses frères respectivement François II et Charles IX, étant lui non plus sans descendance, avait sur son lit de mort désigné comme successeur son cousin protestant Henri de Navarre, le futur Henri IV...
C'est à partir de ce premier prince Bourbon sur le trône de France que Flavie Leroux fait débuter L'autre famille royale. De tout temps les rois prenaient certes des maîtresses officielles : Charles VII avait eu Agnès Sorel, Louis XI Marguerite de Sassenage... Avec ces favorites, ils engendrèrent filles ou garçons qu'ils allaient reconnaître. Mais c'est avec le Vert Galant que les légitimés commencent à exister politiquement. À César, fils qu'il eut de Gabrielle d'Estrées, il octroie le duché de Vendôme. Le duc de Vendôme n'aura cessé d'intriguer contre son demi-frère Louis XIII... L'ouvrage s'achève avec le règne de Louis XV, arrière-petit-fils de Louis XIV, dont la descendance adultérine ne verra le stigmate de sa bâtardise effacé par l'onction royale de la légitimation ni pallié par l'honneur de quelque charge prestigieuse. Au début de la Régence, l'affaire des légitimés qui aboutit à la rétrogradation du duc du Maine et du comte de Toulouse en simples nobles aura échaudé les défenseurs d'une couronne dont on ne dispose pas comme on veut, pas même le roi.
L'autre famille royale. La faillite de l'absolutisme
Passés composés
Tirage: 4 000 ex.
Prix: 23 € ; 450 p.
ISBN: 9782379334801