Bigger than life. Cet anglicisme résume à lui seul l'empreinte qu'Hollywood a toujours voulu imprimer sur les écrans du monde entier. Mais jamais peut-être cette ambition ne fut aussi vraie que lorsque la « colline aux mirages » entreprit d'adapter le monumental best-seller de Margaret Mitchell, Autant en emporte le vent. Par ses dimensions comme par sa nature (jamais aucun film se déroulant durant la guerre de Sécession n'avait jusqu'alors remporté le moindre succès auprès du public américain), le projet s'avérait risqué. Ce fut tout le mérite de son producteur, le redoutable, roué et mégalomane David O. Selznick de s'y atteler et, malgré toutes les difficultés qui s'érigèrent sur sa route, de ne jamais renoncer.
Pour son plus grand profit, car la fin de cette histoire est connue et valut au long-métrage d'être à ce jour encore l'un des plus estimés et des plus vus de l'histoire du cinéma. Il fallut trois ans à cette entreprise pour être menée à bien ; plusieurs cinéastes remplacés au fil des caprices de la production ; des dizaines de scénaristes, dont Ben Hecht et de manière furtive et guère fructueuse, Scott Fitzgerald. Pendant ce temps-là, l'attente du public ne fit que grossir. Il fallut aussi déterminer qui allait incarner le rôle principal féminin, celui de Scarlett, auxquelles prétendirent pratiquement toutes les plus grandes stars d'Hollywood, et qui revint contre toute attente à une presque inconnue, Vivien Leigh, actrice britannique têtue et au caractère parfaitement adapté à celui de Scarlett O'Hara.
Après L'Année des volcans (Flammarion, 2014) qui documentait déjà joliment l'histoire d'amour entre Ingrid Bergman et Roberto Rossellini, le journaliste, historien et romancier François-Guillaume Lorrain prouve avec ce Scarlett, vaste récit de ce tournage tumultueux et de sa préparation, qu'il est parfaitement à l'aise dans le jardin de l'histoire du septième art. Il bâtit sa narration autour de trois personnages principaux, Selznick et Vivien Leigh donc, mais aussi Hattie McDaniel, qui joue le rôle de la servante et sera pour cela la première comédienne noire récompensée par un Oscar et ce dans un contexte où la ségrégation raciale fait encore rage. Elle en paiera le prix fort. Lorrain lui, menant à son habitude une enquête formidable, parvient dans le même temps à incarner parfaitement chacun de ses personnages, jusqu'à ceux qui ne font que de la figuration. Romancier donc, mais aussi metteur en scène...
Scarlett
Flammarion
Tirage: 6 000 ex.
Prix: 20 € ; 336 p.
ISBN: 9782080270597