Il y avait une fois un village d'Europe centrale nommé Vasenka, des soldats y débarquent pour « préserver notre liberté ». Ils parlent un idiome étranger, mais leur vraie langue, c'est la violence, qui s'abat sans explication sur les villageois. Un coup de feu tue un jeune homme. C'est la sidération - un malheur qui tombe d'un ciel qu'assombrit le mal. Aux maux il n'y a ni remède ni mots. Le désastre rend tout le monde coi.
Les poèmes de République sourde - recueil qui valut de nombreux prix à son auteur Ilya Kaminsky, né en 1977 à Odessa (ex-URSS) - sont autant de saynètes pathétiques ou de voix intérieures jouées ou portées parune troupe de marionnettistes. Les dramatis personae : Alfonso, marionnettiste et jeune mari de Sonya ; Sonya, « la marionnettiste la plus douée de Vasenka », enceinte d'Anushka, « de la taille d'un hippocampe, endormie » dans son ventre ; Petya, le jeune sourd cousin de Sonya ; maman Galya Armolinskaya, instigatrice de l'insurrection et propriétaire du théâtre depuis le balcon duquel les marionnettistes enseignent la langue des signes aux villageois...
Désormais les gens de Vasenka signent pour parler, au moyen de ce langage silencieux d'eux seuls connu ils communiquent et résistent. « La neige tombe et les chiens courent dans les rues comme des secouristes »... Tableaux entre Edvard Munch et Buster Keaton. Kaminsky met ici en abyme le cruel théâtre de notre monde où tant de victimes se font égorger tels des agneaux dans l'indifférence ou la couardise mutiques de leurs contemporains.
République sourde Traduit de l’anglais (États-Unis) par Sabine Huynh
Christian Bourgois
Tirage: 2 500 ex.
Prix: 18 € ; 144 p.
ISBN: 9782267045284