Le premier pas. « Ne grimpe pas sur la clôture », a lancé la maman de Clover à sa fille. La clôture est une longue barrière de bois séparant la maison de Clover, petite fille noire, de celle d'Annie, petite fille blanche. Au début, les fillettes s'observent en chiens de faïence. Un jour, Annie s'aventure à grimper sur la clôture et demande si elle peut sauter à la corde avec le groupe des amies de Clover. La réponse fuse, sans appel : non ! Annie obtempère. N'empêche, Clover continue à observer sa voisine de loin en loin, dans les rues du centre-ville où elles flânent chacune main dans la main avec leur maman ou dans le pré les jours de pluie lorsqu'Annie saute joyeusement dans les flaques d'eau. Mais voilà qu'un bel après-midi Annie se tient à nouveau à califourchon sur la barrière et invite Clover à la rejoindre : « Une clôture, c'est fait pour s'asseoir. » Prudente, Clover se contente d'abord d'en toucher le bord avant d'y grimper quelque temps plus tard. Une belle amitié naît sous l'œil vigilant de la mère de Clover qui continue à surveiller les fillettes en étendant le linge. Filant la métaphore de la clôture, centrale dans l'album, Jacqueline Woodson livre un texte d'une grande délicatesse sur la ségrégation raciale. Une fois n'est pas coutume, le point de vue est celui d'une fillette noire. Le message est porteur d'espoir : si, en dépit de nos différences, nous faisons chacun la moitié du chemin, nous parviendrons un jour à nous rencontrer et à dialoguer. Les aquarelles réalistes d'Earl Bradley Lewis montrent, elles, une belle puissance poétique.