Essai/Italie 26 septembre Paolo Rumiz

Les Italiens eurent leurs « malgré-nous » durant la Première Guerre mondiale. Contre leur gré, des Triestins furent enrôlés dans l'Empire austro-hongrois. Cette histoire, Paolo Rumiz la connaît bien. Le plus célèbre des écrivains-voyageurs italiens la rumine de livre en livre lorsqu'il arpente cette Mitteleuropa compliquée. Son grand-père a combattu sur le front oriental sous l'uniforme autrichien. Il a donc été pris pour un mauvais soldat par les deux camps. Un petit cimetière témoigne de cela. L'auteur de La légende des montagnes qui naviguent (Arthaud, 2017) l'a retrouvé. Les corps ont changé de place durant vingt ans, au gré des considérations politiques, comme des cailloux que l'on déplacerait dans le fleuve de l'histoire. « Quel avenir peut avoir un pays qui ne respecte pas ses morts ? » C'est pour répondre à cette question que Paolo Rumiz a repris le chemin, de Trieste à l'Ukraine via la Pologne, et écrit Comme des chevaux qui dorment debout.

Le récit qu'il en tire est comme toujours émaillé de rencontres pittoresques et de saveurs fortes. En toile de fond, c'est bien l'odeur âcre de la guerre qui s'impose, celle de 14-18, mais pas seulement. Paolo Rumiz a le talent d'immerger le lecteur dans le passé en le conviant à ce qui pourrait apparaître comme une simple promenade. Mais l'invitation au voyage prend vite avec lui une autre tournure. L'itinérance devient méditation. « Je voyage pour voir exactement ce que les politiciens - ces gens aux souliers bien cirés - ne voient pas, parce qu'ils n'utilisent que les aéroports. »

Cette énigme européenne, Rumiz la déchiffre dans les trains, les cars, les musées oubliés et les villes endormies. Avec lui, on voyage pour ne plus se raconter d'histoires. On voyage parce qu'on ne devrait faire que ça.

Paolo Rumiz
Comme des chevaux qui dorment debout -Traduit de l’italien par Béatrice Vierne
Arthaud
Tirage: 8 000 ex.
Prix: 21,50 euros ; 374 p.
ISBN: 978-2-08-140830-2

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