Dans un style beaucoup plus didactique, Terra australis n’est pas sans évoquer le très frappant Ile Bourbon 1730 (Delcourt, « Shampooing », 2007), dans lequel Appollo et Lewis Trondheim retraçaient l’émergence de la société réunionnaise. Il s’agit cette fois de la naissance de l’Australie, passion adolescente de Laurent-Frédéric Bollée, mais dans laquelle bagnards et forçats jouent également les premiers rôles. Avec Philippe Nicloux au dessin, le scénariste saisit les personnages de ce « docu-fiction » avant leur départ de leur pays d’origine, dans les bas-fonds et les prisons de Londres. Le 13 mai 1787, ils seront 1 500 hommes et femmes à s’embarquer sur onze navires pour un périple de huit mois vers la future colonie australienne. Il y a le tout jeune orphelin John Hudson ; le colosse noir Caesar, qui a préféré l’Angleterre à l’Amérique, désormais indépendante mais toujours esclavagiste ; ou encore Henry Kable et Susannah Holmes, avec leur bébé né en prison. Il y a aussi le singulier officier de marine Arthur Phillip, qui se voit confier, en tant que gouverneur, le commandement de cette expédition à haut risque en direction de Botany Bay.
Laurent-Philippe Bollée et Frédéric Nicloux relatent dans le détail la préparation de l’expédition et les longs mois de mer marqués par les tentatives d’évasion et les tempêtes, puis l’arrivée à destination le 17 janvier 1788 et l’installation neuf jours plus tard dans une anse soigneusement choisie et aussitôt baptisée Sydney. C’est alors, dans la description des premiers pas des Anglais sur leur nouvelle terre et de leurs premiers contacts avec les Aborigènes, qu’ils livrent leurs planches les plus passionnantes.
Fabrice Piault