Ces dernières années, le milieu de la culture s’est judiciarisé comme l’ensemble de notre société. Les professionnels du livre doivent donc être attentifs aux réformes de la justice qui peuvent modifier la gestion des contentieux. Or, la loi du 23 mars 2019 de programmation et de réforme pour la justice est entrée en vigueur le 1er janvier 2020. Elle a donné naissance au "tribunal judiciaire", issu de la fusion de l’ensemble des contentieux qui relevaient du tribunal d’instance et du tribunal de grande instance.
Le but est de réunir, au sein d’une même juridiction, tous les litiges relevant de la compétence civile de première instance. Précision que, au sein du tribunal judiciaire, les affaires qui étaient jugées par le tribunal d’instance sont traitées à présent par un "juge des contentieux et de la protection".
Limites
Les textes afférents à cette réforme insistent sur le fait que tous les sites sont maintenus et lorsque ceux-ci ne sont pas dans la même commune que l’ancien tribunal de grande instance, l’ancien tribunal d’instance sera dénommé tribunal de proximité. Rappelons que, avant cette réforme de la justice, les tribunaux d’instance étaient compétents pour les litiges aux montants inférieurs à 10000 euros. Le tribunal de proximité qui le remplace peut a priori traiter les litiges civils quel que soit le montant.
Mais ses compétences sont en revanche limitées à une série de problématiques précises liées à la vulnérabilité économique et sociale et touchant à un ordre public de protection (telles que le traitement des situations de surendettement, les procédures modificatives en matière familiale, l’expulsion d’occupants illégaux, la sécurité sociale et la tutelle des majeurs). Pas sûr que le nouveau schéma réponde donc vraiment au souci de "simplification".
Procédure participative
Autre innovation de ce début d’année, l’extension de la procédure participative de mise en état, née de la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle. La procédure participative sert en théorie aux parties accompagnées de leurs avocats pour mettre en état leur litige avant de le faire trancher par le tribunal ou la Cour d’appel. L’objectif officiel est de donner aux parties les moyens d’accélérer le temps de leur procès, la mise en état étant l’une des phases les plus longues d’un procès.
La procédure participative de mise en état se caractérise par la signature d’une convention, avant le retour à la procédure judiciaire. Lorsque les parties et leurs avocats justifient avoir conclu une convention de procédure participative aux fins de mise en état, le juge peut, à leur demande, fixer la date de l’audience de clôture de l’instruction et la date de l’audience de plaidoiries. Il arrive aussi que les adversaires parviennent ainsi, hors du regard du juge, à un accord total sur le fond du litige, le magistrat étant donc chargé de l’homologation dudit accord. Rien de bien neuf en réalité, mais beaucoup de vœux pieux pour tenter de pousser à la médiation et au désengorgement des audiences.
Peu d'enthousiasme
Enfin, point non négligeable, les nouveaux textes posent par principe que les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire, à moins que la loi ou la décision rendue n’en disposent autrement. Et ce alors que, jusqu’ici, l’appel permettait d’écarter l’exécution de la décision.
Il y a donc à présent exécution provisoire de droit sauf si la loi en dispose autrement et sauf si le juge décide d’écarter l’exécution provisoire en tout ou partie car il estime en particulier qu’elle est incompatible avec la nature de l’affaire ou qu’elle risque d’entraîner des conséquences manifestement excessive.
Avouons aussi que l’ensemble de ces changements ne suscite guère d’enthousiasme parmi la grande famille judiciaire, qui n’y voit qu’une façon de diminuer à marche forcée les procès et les voies de recours, faute par les autorités de doter honorablement le budget de la justice.