12 septembre > Cinéma Italie

La dolce vita était un hymne à la vie. En imaginant Le voyage de G. Mastorna, Federico Fellini voulait lui opposer un hymne à la mort, noir et mystérieux, avec le récit post mortem d’un violoncelliste un peu désabusé, dont l’avion s’écrase.

Federico Fellini- Photo DR

Scénario rédigé en 1965, il ne parviendra jamais à réaliser ce projet, notamment par superstition (à la veille du tournage en avril 1967, le réalisateur tombe malade), convaincu qu’il « mourrait » avec ce film. Le manuscrit de cette œuvre maudite avait cependant été dûment déposé en 1966 chez son éditeur suisse. Fellini tenta de ressusciter Le voyage de G. Mastorna en bande dessinée (illustrée par Milo Manara, Casterman, 1996) mais interrompit la série après le premier tome.

La lecture de ce voyage initiatique - quête presque utopiste à la recherche de soi-même - nous immerge dans un univers kafkaïen. Mastorna erre dans un théâtre où sont représentés les drames et les doutes de son existence, pour atteindre une transfiguration, après plusieurs renoncements.

Pour le cinéaste, le monde des morts est aussi « bordélique » que celui des vivants. Laïc, le « Maestro » réfute toute idée de vertu et de châtiment. Son au-delà n’est ni l’enfer, ni le paradis. Seuls changent le temps et l’espace, très relatifs.

Le scénario n’a pas été romancé. Etonnamment littéraire, jusque dans ses références, il dépeint une « conscience fiction », selon l’expression d’Aldo Tascone dans la préface. Par les mots, les images sautent aux yeux : nous sommes spectateur d’un film invisible. Dans ce tourbillon, Fellini laisse transparaître une profonde mélancolie, oscillant entre nostalgie, fatalisme et vitalité. « Le protagoniste meurt parce qu’il a peur de la mort et qu’il a perdu le sens le plus authentique de la vie », écrivait le cinéaste à son producteur. Pourtant ce voyage, foncièrement optimiste, s’avère « merveilleux, merveilleux… ».

Vincy Thomas

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