6 mars > Histoire France

Mikhaïl Gorbatchev est entré dans l’histoire en sortant du communisme. Principalement en ne faisant rien lors de la chute du mur de Berlin en 1989. Il laissa deux peuples séparés retrouver leur destin commun, alors que ses prédécesseurs étaient intervenus avec des chars à Budapest et à Prague. Cette décision fut-elle mûrement réfléchie ou fut-il dépassé par ces événements consécutifs à sa perestroïka (restructuration) et à sa glasnost (transparence) ?

Le travail de Bernard Lecomte permet de répondre à la question. Par son sens du rythme, cette biographie nous entraîne dans l’accélération de la fin du XXe siècle. Construit comme un documentaire, l’auteur alterne les gros plans, les plans-séquences et les plans larges pour nous faire comprendre ce parcours hors du commun.

Porté à la tête du Parti communiste de l’URSS en 1985, l’ancien apparatchik issu de la Russie profonde conduit une série de réformes qui vont aboutir six ans plus tard, à la fin de 1991, à cette dépêche de l’agence Tass : "L’URSS, en tant que sujet de droit international et réalité géopolitique, n’existe plus."

Cet homme qui cumula les pouvoirs au point d’en avoir même plus que Staline entraîna son pays dans une transformation qui lui valut le prix Nobel de la paix. Adulé hors des frontières russes, il reste encore aujourd’hui détesté dans sa patrie où on l’accuse d’avoir fait éclater l’Empire soviétique.

Bernard Lecomte suit cette ascension stupéfiante effectuée avec sa femme Raïssa, personnage clé pour saisir Mikhaïl qui incarne la rupture avec les dirigeants cacochymes et l’ouverture à l’Ouest, jusqu’à ce que son ex-ami Eltsine le pousse à la démission. L’auteur rapporte beaucoup d’anecdotes sur cet homme qui ne fut ni un tyran ni une marionnette. C’est lui qui demande en 1987 que l’on publie le manuscrit que lui avait envoyé Anatoli Rybakov. Les enfants de l’Arbat se vendront à 6 millions d’exemplaires en URSS, sans compter les trente-trois traductions étrangères. Il ne manque pas non plus d’humour, comme en témoigne cet échange savoureux au Kremlin avec Claude Estier, alors que François Mitterrand vient d’évoquer le cas de Sakharov : "Excusez-moi, j’ai dû régler un dossier urgent, l’agriculture nous cause bien des problèmes ! - Depuis longtemps ? - Depuis 1917 !"

L’homme qui posa pour Louis Vuitton a laissé sa marque dans l’histoire du XXe siècle, comme Jean-Paul II. Il était tout naturel que le biographe du pape (Jean-Paul II, Gallimard, 2003, Folio, 2006), grand connaisseur des pays de l’Est, s’intéressât à ce géant qui fêtera le 2 mars ses 83 ans. L. L.

Les dernières
actualités