Emily Maxwell, l'héroïne du nouveau roman de Stewart O'Nan, les lecteurs de l'Américain la connaissent depuis Nos plus beaux souvenirs (L'Olivier, 2005, repris en Points). On la découvrait veuve et inconsolable de la mort de son mari, Henry, lorsqu'elle se rendait avec sa belle-soeur Arlene et le vieux chien Rufus dans une maison de famille à trois heures de route de Pittsburgh.

Les deux femmes et le chien sont à nouveau présents dans Emily. A 84 ans, ladite Emily va tous les mardis au drive-in du Eat'n Park avec Arlene. L'occasion de s'attabler devant un "petit-déjeuner-buffet "deux-pour-le-prix-d'un"". Elle aime aussi aller au club de loisirs, un but de sortie, afin d'échanger les derniers potins avec des relations de son âge.

Le dimanche, c'est l'église, pour être régénérée "par la musique et l'éloquence toute simple de la liturgie". L'héroïne de l'auteur de Speed queen (L'Olivier, 1998, repris en Points) et d'Un monde ailleurs (L'Olivier, 2000, repris en Points) se réveille à l'aube. Elle écoute des CD de Bach, Britten ou Haendel, lit le Post-Gazette en prenant son thé et sa biscotte, sollicite l'aide de Rufus lorsqu'elle peine à remplir sa grille de mots-croisés.

Son corps et son maintien ne sont plus ce qu'ils étaient, mais elle continue de bien s'habiller. Dans le garage, il y a encore la grosse Oldsmobile d'Henry aux allures futuristes. Elle aimerait bien la vendre ou la donner, acheter à la place une hybride comme celle de sa voisine Marcia. Emily a deux grands enfants, Margaret et Kenneth, des petits-enfants qu'elle ne voit pas assez à son goût...

Stewart O'Nan nous ouvre le monde intérieur d'une femme attachante. Très à l'aise dans une veine intimiste où il joue sur les ombres et les lumières, il prend soin d'éclairer toutes les facettes de son personnage. De montrer son rapport au passé et au présent, au temps qui file. Entre réalisme et minimalisme, le résultat donne l'une de ses plus éclatantes réussites.