Au détour d'un paragraphe de sa note intitulée « Refonder la régulation audiovisuelle » publiée début septembre, le Conseil supérieur de l'audiovisuel a lancé un ballon d'essai concernant la publicité pour le livre à la télévision, suggérant une étude d'impact « à propos des secteurs interdits de publicité (cinéma, édition littéraire, distribution) afin de prévoir un encadrement adapté ». Trois semaines plus tard, le rapport issu des travaux de la « mission d'information sur une nouvelle régulation de la communication audiovisuelle à l'ère numérique » abordait plus franchement la question : « comment justifier l'interdiction [...] de la publicité pour le cinéma ou l'édition littéraire à la télévision lorsque les annonceurs disposent d'un nouveau média, de surcroît extrêmement puissant, qu'est Internet ? », interrogent les auteurs du rapport remis par la députée Aurore Bergé (La République en marche, Yvelines) au gouvernement qui prépare pour début 2019 une grande loi sur l'audiovisuel.
Depuis 2004, la publicité littéraire est autorisée sur les chaînes du câble et du satellite. Ces chaînes d'audience réduite et très ciblée restent peu utilisées par les éditeurs, qui annoncent surtout dans la presse, à la radio, et en affichage extérieur, avec une montée progressive d'Internet. L'objectif de cette ouverture limitée était de protéger la diversité éditoriale, seuls les groupes ayant les moyens de s'offrir des campagnes sur les grandes chaînes de la télévision numérique terrestre (TNT). Lors des débats ayant précédé l'évolution de 2004, l'édition s'était montrée plutôt opposée à la levée totale de l'interdiction. A ce stade d'une nouvelle hypothèse de révision, le SNE n'émet pas d'avis sur le sujet.
L'arbitrage relève d'abord de la concurrence entre médias : la télévision souhaite la levée de toutes les interdictions dans l'espoir de compenser le manque à gagner causé par Internet. La presse, la radio et les afficheurs sont évidemment contre, le principal enjeu étant la grande distribution, aujourd'hui autorisée à diffuser des campagnes d'image, mais pas de promotion tarifaire. Selon une étude d'impact réalisée par France Pub, le transfert atteindrait 264 millions d'euros pour la grande distribution, 22 millions pour le cinéma et 5 millions pour la publicité littéraire. En 2016, le marché de la publicité littéraire atteignait 187 millions d'euros en valeur brute, selon Kantar Media. Dans leur rapport, les députés émettaient un avis clair de fin d'interdiction pour le seul cinéma.