À couper le souffle. Étonnante, cette narratrice imaginée par Larry Tremblay, qui n'est autre qu'une souffleuse québécoise. Elle a beau être un monstre d'acier et d'hélices, puissant et jaune, en vrai elle est dotée d'une riche gamme d'émotions humaines. D'ailleurs, plutôt que souffleuse, elle préférerait se faire appeler « souffreuse », tant elle est angoissée par ce matin de février bleu et glacé où elle doit sortir du hangar. La veille, elle a entendu parler de la tempête de neige du siècle qui allait sévir sur la région du Saguenay. Résultat, elle se relève d'un cauchemar terrifiant où les flocons de neige étaient en réalité des enfants qui tombaient du ciel et qui, dans leur chute, détruisaient toits et pare-brise. Tout Chicoutimi croulait sous les enfants-flocons qui la paralysaient. Quel carnage s'annonce pour la souffleuse si sensible ! Elle voit d'ici la charpie de bottes, de cache-nez et de petits os qu'elle laissera derrière son passage... Rarement sa peur de massacrer des enfants n'aura été aussi forte que ce matin. Si seulement elle pouvait éviter la rue des P'tits chenapans où habitent la famille Beaudin et ses douze enfants ! La mort dans l'âme, elle démarre dans un bruit d'enfer. Impossible de se soustraire à son destin qui l'emmène droit dans cette rue où chaque petit Beaudin se cache derrière un bonhomme de neige à son effigie... Venue de la Belle Province, cette souffleuse au grand cœur, écartelée entre son sens du devoir et son empathie, nous donne des sueurs froides. On est soufflés !