Justice

Dans son arrêt rendu le 31 mai dernier, la cour d’appel de Paris a condamné à 4 000 euros de dommages-intérêts et à 3 000 euros au titre des frais de procédure l’auteur d’une enquête sur le Front national (FN) dans le Nord pour atteinte à la vie privée de Steeve Briois, maire d’Hénin-Beaumont et secrétaire général du parti d’extrême droite. Intitulé Le Front national des villes et le Front national des champs, le livre publié en décembre 2013 chez Jacob-Duvernet (en liquidation depuis) et écrit par Octave Nitkowski (défendu par Léa Forestier) évoquait l’homosexualité de celui qui était alors candidat aux élections municipales dans cette ville du Nord. De nombreux articles et enquêtes ont suivi cette première révélation sur les liens entre des cadres du FN et la communauté gay.

Dans son arrêt, la cour d’appel juge que l’auteur ne pouvait, pour illustrer sa démonstration de l’évolution du FN, "choisir de révéler l’orientation sexuelle de l’intéressé en partant du principe pour le moins sommaire qu’il a participé, du fait de son appartenance à la communauté homosexuelle, à l’orientation du parti". La cour souligne aussi que le maire d’Hénin-Beaumont (défendu par David Dassa-Le Deist) ne s’est jamais exprimé sur le sujet, et a même participé à une manifestation contre le mariage pour tous.

Le jeune auteur, qui tenait par ailleurs un blog très suivi sur la vie politique d’Hénin-Beaumont, justifiait cette information par le fait qu’elle pouvait expliquer l’évolution du Front national, jusqu’alors homophobe, mais devenu très réservé lors de l’intense débat entourant la loi sur le mariage pour tous. En référé, le tribunal de grande instance (TGI) de Paris n’avait pas suivi cette argumentation et avait ordonné la suppression des passages litigieux.

Mais toutes les décisions ultérieures ont débouté le maire d’Hénin-Beaumont. En appel, puis en cassation, les juges ont inversé cette ordonnance de référé. Steeve Briois étant "une personnalité politique de premier plan", ils ont jugé que cette atteinte à sa vie privée devait aussi s’apprécier en fonction de la contribution à un "débat d’intérêt général" à propos "des questionnements publics sur les relations entre la droite nationaliste et les homosexuels". Saisi d’une nouvelle assignation au fond, le TGI de Paris avait confirmé cette ligne tracée entre intérêt général et respect de la vie privée.

Eu égard à l’importance de l’arrêt, l’auteur et son avocate préparent un pourvoi en cassation.

Hervé Hugueny

09.06 2017

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