6 février > Roman Allemagne

Christa Wolf est morte le 1er décembre 2011, six mois après l’écriture de cet ultime récit qu’elle a dédié à Gerhard, le mari de toute sa vie. L’écrivaine d’ex-RDA, née en Prusse orientale en 1929, dans un territoire aujourd’hui polonais, a ainsi conclu une œuvre considérée comme l’une des plus importantes en langue allemande du siècle dernier. Et ce bref texte autobiographique publié à titre posthume, qui condense les souvenirs d’une enfance dans la guerre, vient compléter l’édifice constitué par Le ciel divisé (Stock, 2011), Trame d’enfance (Stock, 2009), Aucun lieu, nulle part (Stock, 2009) ou Ville des anges (Seuil, 2012), livres dans lesquels Christa Wolf n’a cessé d’explorer son histoire violente marquée par l’Histoire.

En 1946, dans le nord d’une Allemagne vaincue et divisée, August, 8 ans, orphelin de l’Est, a été recueilli par la Croix-Rouge et conduit au « château des mites », un sanatorium de fortune où sont hébergés et tant bien que mal soignés des tuberculeux. Soixante ans plus tard, c’est sur le chemin entre Prague et Berlin, dans un pays réunifié, qu’August, devenu chauffeur de car de tourisme, bientôt retraité et veuf, retrouve ce passé. Dans l’hôpital improvisé qui manquait de tout, lieu où l’écrivaine a elle aussi séjourné après la guerre, il revoit Lilo, une malade adolescente, « seule au monde, comme lui ». Il se souvient de la joie, ce sentiment auquel il ne pouvait pas donner de mot, que lui apportait cette jeune fille promue au rang d’assistante infirmière, qui chantait et racontait des histoires aux plus jeunes.

C’est un texte d’hiver, précis, concis, éclairé d’une lumière mélancolique, vive et froide. Christa Wolf ressemble à August qui a l’impression « de feuilleter dans ces vieilles histoires comme dans un livre d’images, rien n’est oublié, aucune image n’a pâli ». « J’ai eu de la chance », écrit-elle à son mari dans sa dédicace. Et c’est le mot de la fin.

Véronique Rossignol

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