6 janvier > Roman policier Grande-Bretagne

On reconnaît un authentique auteur de pure fiction, sans tentation "auto", à sa capacité d’inventer un héros remarquable, à le situer au cœur de son petit monde, et à lui faire vivre des aventures passionnantes. Ce qui n’exclut pas quelques réflexions personnelles, et la description d’un milieu que l’on connaît soi-même. A ce titre, qui, mieux que James Runcie, fils de l’ancien archevêque de Canterbury, pouvait donner naissance à Sidney Chambers, chanoine de la paroisse St Andrew et St Mary, à Grantchester, près de Cambridge, dans les années 1950 ?

Sidney est un beau brun d’une trentaine d’années, charmant, cultivé, de surcroît directeur d’études de théologie au Corpus Christi College de Cambridge. C’est un bon vivant, amateur de cricket, de boissons alcoolisées (bière et whisky), "mordu de jazz". C’est un bon pasteur, disponible, compatissant, même s’il se reproche de ne pas en faire assez pour ses ouailles. Il est gentil, modeste, plein d’humour… et célibataire.

Sidney a un ami, le brave inspecteur Keating, avec qui il joue au backgammon en savourant quelques pintes. Et, à chaque fois, il se retrouve embarqué dans ses enquêtes, pour aider la police à démêler le vrai du faux, à attraper les coupables. Et il y prend un plaisir certain. Peccable ?

Ainsi, dans les six histoires de ce premier volume, il élucide un meurtre maquillé en suicide, ce qui lui donne l’occasion d’aider Hildegard, la veuve, une Allemande pour qui il éprouve plus que de la sympathie. Il retrouve la bague de fiançailles d’Amanda Kendall, dérobée par une de ses amies, et, par la même occasion, noue avec la jeune femme, conservatrice à la National Gallery de Londres, une espèce d’idylle, "une amitié inattaquable". Ou bien il confond un père tyrannique et homophobe, assassin d’un lord qu’il soupçonnait d’être amoureux de son fils. Sidney, d’une extrême tolérance, défend le droit de chacun d’avoir une vie privée, à rebours de l’opinion de son temps et de la position officielle de son église. Dans sa vie, il y a aussi Leonard, son vicaire gay, Madame Maguire, sa gouvernante grincheuse mais dévouée, et Dickens, son jeune labrador noir, cadeau d’Amanda.

C’est original, extrêmement réussi, so british. On pense bien sûr à Agatha Christie. Les mystères de Grantchester font aussi l’objet d’une série pour la télé épatante, diffusée l’été dernier en France, et passée un peu inaperçue. Les fans de polar chic attendent déjà avec impatience la suite des aventures de Sidney Chambers, à lire et à voir. Jean-Claude Perrier

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