Il y a dix ans d’écart entre François Berléand, né en 1952, et Philippe Claudel, en 1962. Ils ont tous les deux écrit des livres sur le tard. Encore plus tard pour le premier nommé, quand même surtout connu comme acteur, puisqu’il avait 54 ans à la parution du Fils de l’Homme invisible , le seul titre de sa bibliographie à ce jour, tandis que le second n’en avait que 37 quand il a publié Meuse l’oubli . Philippe Claudel s’est bien rattrapé depuis : une vingtaine d’ouvrages en huit ans. Probablement François Berléand n’aura-t-il pas le loisir d’en faire autant, le cinéma lui laissant après tout peu de temps. Mais, si Philippe Claudel, récemment passé derrière la caméra, faisait tourner François Berléand, que se raconteraient-ils ? Des histoires de premiers baisers, peut-être… Dans Chroniques monégasques et autres textes , de Philippe Claudel, apparaît tout à coup La grosse Frenzi . C ’est une histoire classique d’enfance et des premiers chatouillis qui vous prennent en regardant les filles. Isabelle est superbe, Philippe – supposons que c’est lui – écrit des poèmes qui font rimer le prénom de l’aimée avec… mortadelle ! Au fond, elle n’était peut-être pas si jolie que cela. D’ailleurs, au goûter d’anniversaire, ce jour-là, c’est Benoît qui embrasse Isabelle sous le regard dégoûté de Philippe. Qui, à la huitième reprise des Neiges du Kilimandjaro (Pascal Danel, ça ne nous rajeunit pas), se voit entraîné sur la piste provisoire par Christine Frenzi, la grosse Frenzi. Danser , déjà, c’est dur. Le plus dur est à venir, quand « elle rapprocha vivement son visage du mien et planta sa langue dans ma bouche. » Il est question d’escargots et de limaces, d’étouffement et de supplice… On ne souhaite cela à personne, bien sûr. Sinon que ça arrive à tout le monde. Non ? Regardez François Berléand. Lui, c’est sur Michelle , des Beatles, 1965 ou 66. Peu importe. Elle s’appelle Véronique (et non Claire, la beauté de l’école dont François est raide dingue), elle est « un peu boulotte » et les autres garçons l’appellent « la Baleine » . Baleine, mais pas bégueule : « c’est au moment où je m’y attends le moins que Véronique met sa langue dans ma bouche. » C’est long et baveux, les lèvres sont en feu mais, finalement, ce n’est pas si mal. Il est vrai que François avait déjà, par le passé, tenté une autre expérience. En tout cas, remarquez que, dans les deux cas, c’est la fille, malheureusement pas vraiment la fille rêvée, qui prend l’initiative. Quels ballots, ces garçons ! _____________  Philippe Claudel, Chronique monégasque . Folio, n° 4689, 114 pages François Berléand, Le fils de l’Homme invisible . Le Livre de poche, n° 30986, 221 pages
15.10 2013

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