Hasard du calendrier, les intrigues de plusieurs nouveaux titres à paraître d'ici avril, fictions littéraires ou bandes dessinées, ont un virus au cœur. Pour le public en état de psychose collective, ce sera peut-être l'occasion d'une lecture exutoire, en attendant la production de documents et d'essais scientifiques, politiques ou sociologiques sur le Covid-19, sa gestion et ses conséquences. En Italie, le pays européen le plus touché par le coronavirus, les ventes de La peste, d'Albert Camus, connaissent un net regain. Mais pour l'heure le premier virus auquel le monde du livre est confronté est celui de l'incertitude, cet ennemi des affaires qui chemine de concert avec l'évolution du nombre de cas déclarés de la maladie.
Ces jours-ci, la Banque de France estimait à - 0,3 % l'impact probable de l'épidémie sur la croissance française. En fonction de l'évolution de la conjoncture sanitaire du pays, cette évaluation pourrait encore être dégradée d'ici quinze jours. Mais, tandis que la fréquentation d'une partie des commerces de livres tend à s'effriter, l'annulation contrainte de Livre Paris et d'autres manifestations de promotion du livre et de la lecture confirme d'ores et déjà que la chaîne du livre sera touchée comme les autres secteurs économiques par les effets du coronavirus. L'ampleur de la crise chinoise affecte en partie la chaîne d'approvisionnement de l'édition française et ses ventes de droits. La perturbation du calendrier des foires professionnelles internationales constitue un autre symptôme négatif.
Après le report en mai de la Foire du livre pour la jeunesse de Bologne, l'annulation pure et simple de la Foire de Londres, après que tous les grands acteurs mondiaux s'en sont retirés, ne procède pas seulement de préoccupations de santé. Elle constitue une mesure d'économie conservatoire face à une crise dont il faut espérer qu'elle succombe au réchauffement printanier.