Donald Trump a réussi mercredi son pari de revenir à la Maison Blanche avec une victoire sans appel, qui provoque une onde de choc aux États-Unis et à travers le monde, notamment dans le monde du livre.
« Trump ne représente rien, c'est juste le symptôme d'une Amérique qui se déteste », a tiré sur France Inter l'éditeur Oliver Gallmeister. « Il faut dire qu'il a engagé à ses côtés J.D Vance qui est peut-être le seul intellectuel américain de droite », rappelle dans le même cadre François Busnel, fondateur de la revue America et ancien animateur de la Grande librairie, sur France 5.
« La souffrance qui va venir après cette élection va être énorme » (Lauren Groff)
« La souffrance qui va venir après cette élection va être énorme », a de son côté réagi Lauren Groff, romancière « préférée » déclarée de l'ancien président démocrate Barack Obama, également libraire en Floride.
« Je reçois déjà des messages d'amis auteurs qui sont abattus mais ils vont écrire là-dessus, c'est sûr, car c'est ce qu'ils font ! » a ajouté Oliver Gallmeister, dont la maison d'édition Gallmeister est spécialisée en littérature étrangère et américaine. Contacté par Livres Hebdo, il précise que cet évènement ne bouleversera pas sa manière de travailler. « Nous sommes acteurs de la culture entre les peuples, nous devons réfléchir sur nos cultures, nos différences et cela ne va que renforcer ma détermination à bien faire mon travail d'éditeur ».
Président fondateur du festival littéraire America et directeur de la collection « Terre d’Amérique » chez Albin Michel, Francis Geffard , également joint par Livres Hebdo, voit dans l’élection de Donald Trump une « preuve supplémentaire de ce dont est capable l’Amérique, du meilleur comme du pire, un pays neuf et vaste, à l’histoire contrastée et dont Donald Trump n’est que la dernière illustration ».
« Dans leur immense majorité, les écrivains américains appartiennent à l’Amérique qui n’a pas voté pour Trump » (Francis Geffard)
Les conséquences devraient néanmoins rester faibles sur l’activité éditoriale : « Dans leur immense majorité, les écrivains américains appartiennent à l’Amérique qui n’a pas voté pour Trump. Ils ont leurs lecteurs en France et l’élection de Trump ne devrait pas y changer grand-chose », estime-t-il.
Représentatif de cette prise de distance avec Donald Trump, l’écrivain Colson Whitehead, dont le dernier roman La règle du crime a paru le 25 septembre chez Albin Michel dans la collection « Terres d’Amérique », a déploré sur France 2 le résultat de l’élection présidentielle. « Le pays est vraiment divisé, je n’entrevois pas de réconciliation de mon vivant », s’est-il livré.
Lors de son premier discours après la soirée électorale, Donald Trump a salué sa « magnifique femme » Melania Trump, appuyant sur le fait que son autobiographie Melania (Simon&Schuster) sortie un mois avant le scrutin s'est hissée au premier rang des meilleures ventes de livres.
« Une forte imprégnation des idées masculinistes dans la société américaine » (Camille Froidevaux-Metterie)
Que ce soit par le dessin ou par le texte, de nombreux auteurs français ont également réagi via les réseaux sociaux pour manifester leur colère et leur déception.
Nicolas Mathieu, prix Goncourt 2018 pour Leurs enfants après eux (Actes Sud) exprime son désarroi sur un Instagram : « Hunter S. Thompson avait suivi la campagne de Nixon en 72 et rendu un texte aussi peu impartial que cruellement lucide. On imagine ce qu'il aurait fait cette fois-ci. » Suivi d'une tirade de l'auteur dirigée contre Trump, à la manière du journaliste américain.
L'autrice des Culottées (Gallimard), Pénélope Bagieu, partage également sa colère et publie une série de réactions en story ainsi qu'une illustration de l'artiste britannique Cornelia Parker légendée « The Horror! The Horror! »
Camille Froidevaux-Metterie, philosophe féministe autrice de Patriarcat, la fin d'un monde (Seuil), partage en story un décryptage des votes, déplorant un « Gender Gap » entre les électeurs de Donald Trump et de Kamala Harris. Elle met en garde contre « une forte imprégnation des idées masculinistes dans la société américaine ».
Louison, autrice de l'adaptation de Putzi (Futuropolis), roman de Thomas Snégaroff, exprime sa peur à travers une série de dessins partagée sur Instagram et sur X avec en légende « Mes dessins de la nuit, qui avaient compris avant moi la catastrophe à venir… Je pense à toutes les américaines ce matin. Quel enfer ».