Les premières réactions au décès de Christian Bourgois

Christian Bourgois © Olivier Dion

Les premières réactions au décès de Christian Bourgois

L’annonce de la disparition de Christian Bourgois, le 20 décembre dernier, suscite des réactions de la part de nombreux professionnels du livre. Voici les premiers hommages que nous avons reçus. Livres Hebdo ouvre aussi un forum sur son site pour recueillir vos impressions et vos souvenirs.

Par Christine Ferrand
avec cf Créé le 15.04.2015 à 20h04

Forum sur Livreshebdo.fr : Que représentait-il pour vous ?

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Jean-Claude Dubost, P-DG d’Univers Poche et l’équipe de 10/18 :
« Christian Bourgois a dirigé la collection 10/18 de nombreuses années (de 1968 à 1991) et nos liens ont toujours été proches.
Jusqu'à une période récente nous avons eu des témoignages concrets de sa complicité avec 10/18 qu'il s'agisse des couvertures ou des nombreux auteurs de notre catalogue (John Fante, Jim Harrisson, Toni Morrisson, Richard Brautigan, William Burroughs…) qu'il a contribué à faire découvrir au public français.
Nous perdons avec la disparition de Christian Bourgois un ami et un très grand éditeur, particulièrement innovant. »

Le Syndicat de la librairie française :
« La collectivité des libraires salue la mémoire de Christian Bourgois, décédé ce matin.
Convaincu de la nécessité d'impliquer fortement les pouvoirs publics au service du livre, Christian Bourgois fut un artisan d'une politique culturelle engagée. Cette volonté s'est exprimée notamment lors de l'élaboration et lors de l'application de la loi du 10 août 1981 par un engagement sans faille; elle s'est également traduite par son implication au sein d'instances telles que le Centre national du livre ou la Bibliothèque nationale de France.
Christian Bourgois aura grandement participé, durant un demi-siècle, à l'animation du livre, par son souci de l'entretien de sa mémoire (l'Imec), sa portée “militante” (édition des Versets sataniques), sa diversité (loi du 10 août 1981).
Christian Bourgois disparu, la librairie perd donc un ami fidèle : sa civilité, ses convictions nous manquent déjà. »

Antoine Gallimard :
« Christian Bourgois pour qui j’avais une grande amitié était vraiment exceptionnel. Non seulement pour le catalogue qu’il a construit ou les engagements professionnels qu’il a pris - je pense notamment à la Scelf -, mais aussi parce que c'était quelqu’un de généreux qui savait se réjouir des succès des autres et qui établissait une vraie relation de complicité avec les auteurs. Grâce à lui, j’ai pu reprendre Pessoa en Pléiade par exemple et Fayard a pu publier des oeuvres complètes de Boris Vian. Il aimait faciliter la relation entre ses auteurs et les éditeurs qui pouvaient apporter un prolongement à leurs oeuvres. Il se trouvait du côté des « affinités électives » à la Valery Larbaud. Il aimait faire partager ses découvertes, avec une vraie dimension de générosité. Pour moi, c’était quelqu’un d’exceptionnel.»

Le Syndicat national de l'édition :
« La collectivité des éditeurs, le Syndicat national de l'édition et son Président, Serge Eyrolles rendent un unanime hommage à Christian Bourgois décédé le 20 décembre 2007. C'est une terrible perte pour la famille de l'édition. Passionné dès ses débuts par son métier de 'passeur', il a gardé intacte cette fougue et cette intelligence dans sa recherche des auteurs, dans le dialogue et la compréhension de ceux-ci, toutes qualités qui permettent le passage du texte vers les autres.
Son exigence perpétuelle et son courage dans ses prises de décision éditoriales (il a notamment publié en 1989 les 'Versets sataniques' de Salman Rushdie, avec les risques que l'on exigence) ont fait de lui un exemple brillant pour nombre de nos confrères. Engagé sur les causes de la profession, notamment la loi de 1981 sur le prix unique du livre, il a participé à de nombreuses actions collectives et donné toute son énergie aux institutions culturelles françaises.
Toute la profession pleure le départ de ce vrai grand éditeur et témoigne à ses proches toute son affection. »

Bernard de Fallois :
« J'ai passé des années sans le connaître, victime d'un préjugé à son encontre : je le croyais atteint de parisianisme aigu. Grande leçon : ne jamais se fier aux apparences, ni écouter les réputations. Son ami Hugues de Giorgis me révéla le vrai Christian, attentif aux autres, dépourvu de vanité, bienveillant dans un milieu qui ne l'est pas tellement, plus attaché aux livres qu'il s'efforçait de défendre qu'à sa réussite personnelle. C'est bien ainsi qu' il m'est apparu plus tard, quand nous avons travaillé dans le même groupe. Il savait que cette façon de pratiquer son métier n'était pas sans risque. Tous les bouleversements qui se sont produits depuis cinquante ans dans l'édition ne l'ont pas fait changer d'avis. »

Christian Thorel, librairie Ombres Blanches (Toulouse) :
«Trois demi-cercles pouvant former un C et un B, se croisent dans des sens complémentaires et aussi opposés. Une ouverture symbolisée sur l’infinie combinatoire des lettres. Associée à celle des chiffres 10 et 18, cette typographie a animé notre jeunesse, puis quarante années de production nous ont fait croire que l’éternité des univers et des esprits littéraires nous rendait immortels. La disparition de Christian nous sidère. Et nous bouleverse.
J’avais depuis vingt ans ajouté à l’admiration pour l’histoire personnelle et l’œuvre incomparable une affection grandissante pour un homme qui ajoutait au génie de l’intuition et de la découverte une cordialité, une complicité, associées à une fidélité rares. La manière, stoïque, avec laquelle il a passé les années qui ont suivi sa maladie m’a beaucoup impressionné. L’énergie mêlée à la tranquille mélancolie, une distance impliquée, et un regard sans complaisance sur le monde me font penser au Prince Salina dans le roman Le Guépard. A l’image du patricien de Palerme, sa singularité nous rendait « intranquilles ».
Nous continuerons à nourrir notre « intranquillité » dans le catalogue qui continuera de porter son nom, enluminé de ses trois lettres entrelacées.»

Christine Albanel, ministre de la culture et de la communication :
« Avec Christian Bourgois disparaît un seigneur de l’édition. Il appartenait à cette génération des grands éditeurs, européens et cosmopolites, habité par une véritable vision de leur métier. Le « style Bourgois » était fait d’élégance et de lucidité, de distance et de curiosité (...).Convaincu qu’un éditeur est « aussi investi d’une mission de service public » Christian Bourgois croyait au rôle de l’Etat et en particulier du ministère de la Culture dans l’accompagnement et le soutien au livre. Il a consacré beaucoup de son temps à l’action collective de l’Ina, au Syndicat National de l’Edition, du Centre-Beaubourg à la Bibliothèque nationale de France, du Centre national du Livre (dont il était le plus ancien membre du Conseil d’administration), à l’IMEC dont il fut pendant onze ans le président actif et efficace.»


15.04 2015

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