Une fois n'est pas coutume, c'est peut-être dans le domaine étranger que se situent les livres les plus attendus de cette rentrée littéraire. La quantité de romans et de nouvelles à paraître entre août et octobre est cette année supérieure à celle de l'année dernière (219 livres contre 204). Et si la prééminence de la langue anglaise (un peu moins de 50 % des traductions), n'est pas remise en cause, c'est la qualité de cette fournée 2011 qui laisse pantois.

De quels livres parlera-t-on plus que du Freedom de Jonathan Franzen (L'Olivier), d'Une femme fuyant l'annonce de David Grossman (Seuil) ou du colossal (deux tomes, 1 000 pages...) 1Q84 d'Haruki Murakami (Belfond) ? Franzen a eu sa bobine sur la une de Time Magazine, et Freedom, immense succès aux Etats-Unis, a confirmé après Les corrections qu'il incarnait bien la figure de grand romancier américain de ce temps, telle que la France en réclame depuis Hemingway... Idem, versant japonais, pour Murakami dont le 1Q84 (le troisième et ultime tome paraîtra au mois de mars prochain), réflexion désenchantée sur la société nippone en même temps qu'histoire d'amour, semble être un concentré magnifique de toute l'oeuvre. Enfin, le livre de David Grossman, écrit après la mort au front du fils du romancier, est annoncé comme un choc, aussi bien littéraire que moral.

Derrière ces trois "têtes d'affiche", on prendra garde à ne pas en oublier d'autres, dans le continuum de quelques-unes des oeuvres les plus appréciées par les lecteurs français. Il en va ainsi de Paul Auster et de son Sunset Park (Actes Sud), du nouveau gros roman historique d'Arturo Pérez-Reverte, Cadix ou La diagonale du fou (Seuil), du Pulsations de Julian Barnes (Mercure de France), du très impressionnant Sanctuaire du coeur de Duong Thu Huong (Sabine Wespieser) et de trois "sages" qui attendront octobre pour se mêler à ce pandémonium de rentrée : Philip Roth et Le rabaissement (Gallimard), Mario Vargas Llosa pour Le rêve du Celte (Gallimard) et, sur un registre plus "populaire", le nouveau Douglas Kennedy, Cet instant-là (Belfond).

TRANSFORMER L'ESSAI

Ce moment de la rentrée sera également crucial pour certains romanciers dont les premières oeuvres traduites en France leur avaient ouvert les voies du plus large succès et qui se trouvent devoir "transformer l'essai". Ce sera le cas des deux révélations de l'année dernière, prix Femina et Médicis, Sofi Oksanen et David Vann. La première publie Les vaches de Staline (Stock), un roman antérieur à Purge ; le deuxième revient avec Désolations qui fait suite à son magistral Sukkwan Island. Dans le même registre, on suivra avec attention le destin en librairie de Persécution (Liana Levi), le nouveau roman d'Alessandro Piperno, cinq ans après le sublime Avec les pires intentions, ou de Ce qu'on peut lire dans l'air (Albin Michel), qui permettra de retrouver Dinaw Mengestu après son livre très remarqué, Les belles choses que porte le ciel.

DES RÉVÉLATIONS À VENIR

Si les découvertes de Sofi Oksanen et David Vann avaient illuminé la rentrée 2010, quels seront leurs successeurs ? Si le principe des (bonnes) surprises est qu'elles doivent le rester, on se risquerait volontiers à miser une petite pièce sur la bonne fortune du Room d'Emma Donoghue (Stock), récit d'enfance d'une Canadienne inconnue en France et qui ne devrait plus le rester très longtemps. Comme on ne devrait plus non plus ignorer les noms de Stephen Kelman, dont le Pigeon anglais (Gallimard) vole magnifiquement entre le Ghana et l'Angleterre, ou du cinéaste Paolo Sorrentino, qui fait une entrée remarquée en littérature avec Ils ont tous raison (Albin Michel), récit fou de l'Italie en temps de berlusconisme. Signalons aussi chez Actes Sud un roman venu de Corée du Nord, Des amis, de Baek Nam-Ryong, qui a rencontré un grand succès aussi bien dans son pays qu'en Corée du Sud.

Enfin, au nombre des insolites intrigants de cet automne en terres étrangères, on signalera la publication de Savrola (Ecriture), un roman de jeunesse du prix Nobel de littérature 1953, sir Winston Churchill... Ou, dans un tout autre registre, de Palo Alto (Michel Lafon), un curieux roman de formation du "wonder boy" d'Hollywood, le très séduisant et doué James Franco.

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