Monsieur Toussaint Louverture est l’as de la découverte. Grâce à lui, les lecteurs français ont ainsi pu dévorer Le dernier stade de la soif de Frederick Exley (repris en 10/18) ou Karoo de Steve Tesich (repris en Points). Sa dernière trouvaille a pour nom J. Robert Lennon. Un écrivain américain né en 1970 dont il est allé pêcher le bouillonnant Mailman que Sam Mendes doit porter à l’écran.

On s’apprête ici à suivre les tribulations d’un certain Albert Lippincott. A 57 ans, celui-ci habite à Nestor, dans l’Etat de New York, une ville universitaire et ouvrière. Notre homme conduit une Ford Escort avec hayon quand il n’est pas au volant de son fourgon postal. Car Albert est employé des postes.

Il travaille "dans le centre-ville, distribue le courrier à tous types de populations, issues de toutes les classes sociales, tous entassés au même endroit". Sauf qu’il lui arrive de garder par-devers lui certaines missives, d’ouvrir des enveloppes à la vapeur. "Le courrier est un privilège, qui n’est pas sans risque. Il peut tout aussi bien embellir votre journée que la foutre en l’air", reconnaît-il.

Peu à peu, se dessine le portrait d’un excentrique qui aurait pu évoluer dans un roman de John Kennedy Toole ou de Kurt Vonnegut. Un "mailman" souvent déçu qui aime les jeux radiophoniques, gagne un bon pour une assiette d’œufs au plat de chez Pop’s Deli et un appareil photo 35 mm. Albert a étudié à la fac, été un apprenti physicien, mais s’est retrouvé à l’hôpital universitaire.

Il a divorcé d’avec une infirmière, a cohabité avec un chat qu’il a essayé d’abandonner en pleine campagne. Ce qui lui a permis de faire la connaissance de Semma. Une femme "un peu barrée" qui se prétend entièrement composée de "matériaux biologiques"… A propos de l’épatant Mailman, laissons le mot de la fin à Monsieur Toussaint Louverture qui le dit mieux que personne : "C’est la chronique sous tension d’un combat perdu d’avance. C’est comique et tragique à la fois." A lire d’urgence, donc ! Alexandre Fillon