La dernière duchesse. Dans l'esprit de la jeune épouse, une évidence : son mari projette de la tuer. Elle a 16 ans. Un an plus tôt, elle quittait Florence pour suivre Alphonse II, duc de Ferrare qui, au début de cette histoire, rajuste la position de son couteau avant que le dîner leur soit servi. « Comment compte-t-il s'y prendre ? [...] Un couteau dans un couloir sombre ? Ses mains autour de sa gorge ? Une chute de cheval qui passerait pour un accident ? Il ne fait aucun doute que chacune de ces idées ait pu être nourrie par lui. » Lucrèce, la discrète, la sensible, n'était pas promise à un tel destin. Cinquième enfant et troisième fille du grand-duc de Toscane et d'Éléonore de Tolède, elle grandit dans l'ombre d'un palais florentin, libre d'exercer ses talents artistiques et d'observer les manigances de la cour. Mais quand sa sœur aînée Marie décède la veille de son mariage, Lucrèce est choisie pour la remplacer au bras de son promis. Politicien ambitieux et impitoyable, esthète et mécène des artistes de son temps, Alphonse d'Este a plusieurs visages que Lucrèce découvre souvent à ses dépens, emmenée loin des siens, dans une cour étrangère qui ne l'accueille pas à bras ouverts. « Vous serez punie », lui susurre sa belle-sœur à l'oreille, comme un funeste présage. D'autant que Lucrèce, délaissée par son époux, n'est pas en mesure d'offrir l'héritier tant attendu, qui scellerait par le sang l'union des deux familles les plus puissantes de l'Italie de l'époque.
Dans Hamnet (Belfond, 2021), Maggie O'Farrell transportait son lecteur dans l'Angleterre rurale de la fin du XVIe siècle à la rencontre du fils oublié de William Shakespeare qui inspirera au dramaturge sa pièce la plus célèbre. Avec ce Portrait de mariage, la romancière plonge au cœur de la Renaissance italienne en retraçant la trajectoire d'une femme empêchée, en lutte pour sa survie. Si Lucrèce de Médicis est peu connue sous nos latitudes, son existence tragique a été popularisée outre-Manche par le poème de Robert Browning My Last Duchess, l'un des plus célèbres de la littérature anglaise. Si les premières pages du récit se veulent d'emblée crépusculaires, la vie que Maggie O'Farrell insuffle en chacun de ses personnages nous donne l'impression d'évoluer dans le tableau dépeint, brossé avec une infinie grâce et subtilité.
Le portrait de mariage
Belfond
Tirage: 20 000 ex.
Prix: 23.50 € ; 416 p.
ISBN: 9782714499141