A l’approche du lancement des états généraux de l’information (EGI), qui doivent débuter en septembre et se poursuivre jusqu’à l’été prochain, la SNLE-CFDT souhaite prendre part aux débats. Martine Prosper, secrétaire générale de la branche édition de l’organisation syndicale, estime que le livre n’est plus à part face à la problématique de pressions éditoriales et qu’il faut protéger le métier d’éditeur de l’influence idéologique que pourraient installer les investisseurs au sein des maisons d’édition.
Livres Hebdo : Fin juillet, vous avez co-signé une lettre de votre organisation syndicale à destination de la ministre de la Culture et des responsables des états généraux de l’information qui reprend les contributions du mouvement préalable au débat. Pourquoi la branche de l’édition devrait y prendre part ?
Martine Prosper : Pendant longtemps l’édition dans son ensemble s’est sentie à part des problématiques de concentration éditoriale qui pesaient déjà dans le secteur de la presse. On se rend compte aujourd’hui que les livres sont devenus des enjeux d’influence idéologique et qu’il n’est pas nécessaire d’attendre le sort de la presse pour défendre les métiers du livre. S’il est urgent de renforcer les garanties d’indépendance rédactionnelle des journaux en cas de changement d’actionnaire, il est nécessaire de garantir de la même façon l’indépendance éditoriale des maisons d’édition de livres. Les débats qui s’ouvrent au niveau national avec ces états généraux de l’information doivent prendre en compte les problématiques du monde du livre.
Une carte d'éditeur, à l'instar de la carte de presse
Quelles sont les menaces, selon-vous ?
A bas bruit, on commence à voir des pressions du même type que dans la presse : sur les programmes éditoriaux de certaines maisons d'édition ou la dé-publication de livres. Au-delà de la littérature générale, il y a une vocation citoyenne du livre et les enquêtes journalistiques ou les documents sensibles doivent être préservés de toute ingérence. L’édition scolaire et parascolaire est également concernée, ainsi que les livres pour enfants qui concourent à l’ouverture au monde et à l’éducation citoyenne des nouvelles générations. Quid, demain, des valeurs de tolérance et de respect des autres que s’attachent à promouvoir les albums et textes pour la jeunesse ? Si ces pressions commencent dans les grands groupes, cela se passera ensuite ailleurs !
Comment y remédier ?
Nous avons cette proposition de « carte » d’éditeur, à l’instar de la carte de presse, qui protègerait l’indépendance du professionnel vis-à-vis de ses actionnaires et lui permettrait de quitter la maison en cas de changement à la tête de sa structure. C’est un débat qui va au-delà de la revendication syndicale et dont on veut parler avec tout le monde en interne de la profession. Nous devons mener une campagne de sensibilisation, notamment au niveau européen, mais également lors des états généraux de l’information. Nous l’évoquerons lors de notre prochaine rencontre avec le président du SNE (Vincent Montagne - Syndicat National de l’Edition) pour savoir ce qu’en pensent les patrons de maisons d’édition et nous espérons rencontrer très prochainement les responsables des EGI.