Le 3 juin 1944, le jeune Germain dit Mainou, même pas dix ans, héros et narrateur de ce livre, perd sa mère, à Montpellier, où s'était installée sa famille, originaire de Lorraine. Comme son père, combattant dans la Résistance, ne peut s'occuper de lui, le garçon va devoir rejoindre sa grand-mère paternelle, ses oncle et tante à la Frohmühle, une petite ferme épicerie du pays de Bitche, juste sur la frontière entre la France asservie et l'Allemagne nazie. C'est-à-dire passer de la « zone nono » à la zone occupée, sans Ausweis. Il y parvient bravement, en train, puis dissimulé dans une charrette de foin.

L'accueil est chaleureux, mais vigilant : le gamin, clandestin, va devoir vivre cloîtré dans la maison, le plus souvent à la cave, sans se montrer à quiconque. Sinon, la famille risque le pire, d'autant qu'elle cache dans son grenier la belle Sylvia, la meilleure amie de sa mère, une Juive qui écrit des poèmes et des lettres d'amour pour tous ceux qui la sollicitent.Mainou, éperdu, inconsolable, confiant à un cahier le récit de sa vie monotone, de cette enfance confisquée, le tout adressé à sa mère défunte, va rester là jusqu'à l'arrivée des Américains et la libération du coin, le 20 mars 1945. Enfin le 14 mai, il repart pour Montpellier avec son père, blessé mais sauf. Mathias Malzieu prête, avec pudeur et émotion, sa plume à son père, son « guerrier de porcelaine », dans ce récit drôle et tendre, sensible et mélancolique, qui sonne toujours juste.