Avant-critique Roman

Melinda Nadj Abonji, "Le soldat-tortue" (Métailié)

Melinda Nadj Abonji - Photo © Gaëtan Bally

Melinda Nadj Abonji, "Le soldat-tortue" (Métailié)

Que peut l'imaginaire face à l'absurdité de la guerre ? Entrelaçant deux destins emportés par l'histoire, Le soldat-tortue de Melinda Nadj Abonji offre une réponse lumineuse.

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Par Laëtitia Favro
Créé le 14.06.2023 à 14h00

Ce cœur qui haïssait la guerre. En gare de Zurich, L'ange protecteur de Niki de Saint Phalle voit passer une jeune femme pressée. Au guichet, Hanna demande un aller simple pour Budapest, qui n'est qu'une étape vers sa destination : un pays, la Yougoslavie, qui n'existe plus, ravagé par une guerre fratricide dans laquelle Zoltán, le cousin d'Hanna, a été enrôlé.

Depuis qu'il est tombé, enfant, de la moto de son père « comme un sac de farine », on le dit différent. Boulanger, c'est ainsi que son père l'avait rêvé, pour laver « son sang de bohémien dans la blancheur de [ce] métier ». Mais Zoltán ne vit que pour son jardin, pour les plantes, les insectes, le soleil et la pluie. Ne vivait, jusqu'à ce que la guerre emporte tout. Confronté à sa brutale réalité, Zoltán fait l'expérience de la violence, de l'humiliation et de la mort, questionne avec ses mots empreints de bon sens les passions qui gouvernent les hommes. « À l'armée, il y a des phrases qui commencent on ne sait où et se terminent ailleurs, et entre les mots il n'y a pas moyen de reprendre son souffle. » Née en Serbie en 1968, Melinda Nadj Abonji a composé Le soldat-tortue en mémoire de son cousin, mort lors du conflit en Yougoslavie, et de deux autres jeunes hommes, détruits par leur entrée dans l'armée. Son récit, parcouru de fulgurances poétiques, est un chant contre l'absurdité de la guerre, celle des Balkans comme toutes les autres, et les voix mêlées d'Hanna et Zoltán le portent avec une infinie justesse.

Melinda Nadj Abonji

Métailié
Tirage: 3 000 ex.
Prix: 18 € ; 160 p.
ISBN: 9791022613064

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