Comme les années précédentes, 2014 n’aura pas vraiment souri aux éditeurs en informatique. L’absence de nouveautés sur le front des logiciels et des langages de programmation, conjuguée au raccourcissement chronique des linéaires en librairie, a conduit à un nouveau resserrement des ventes, parfois brutal pour certaines maisons. A tel point que certains ont choisi de jeter l’éponge. Dès le début de 2014, Pearson, l’un des acteurs majeurs du secteur, a stoppé sa production sur la branche informatique. Autre maison de poids, Micro Application, engluée dans une passation de pouvoir complexe au sein de sa maison mère, MA éditions, a cessé son activité en juillet. Reprise en février 2015 par Eska, dirigé par Serge Kebabtchieff, la structure commence, ce printemps, à reprendre doucement ses publications et prévoit une dizaine de titres en 2015.
En attendant Windows 10
Réduits au nombre de cinq, les éditeurs abordent toutefois 2015 sous de meilleurs auspices. Eric Sulpice, directeur éditorial d’Eyrolles, se réjouit notamment de voir que sa cause "commence à être entendue en librairie". Surtout, l’éditeur a bénéficié de sa position de pionnier sur un marché émergent, la programmation pour enfants, en ouvrant, dès mars, une nouvelle série. Scratch pour les kids, accessible dès 8 ans, a été très bien accueilli et sera suivi en juin d’un cahier d’activités. En revanche, Python pour les kids, destiné aux collégiens, est resté plus discret. Tout comme Eyrolles, First s’apprête à mettre sur le marché, d’ici à l’été, un manuel sur Scratch. Destiné à la fois aux parents et aux enfants, il sortira sous la bannière "Pour les nuls" mais avec une maquette un peu différente, "les enfants n’ayant pas le second degré nécessaire pour comprendre l’intitulé de la collection", souligne Jean-Pierre Cano, directeur éditorial informatique et vie numérique de First. En fonction des ventes, 5 à 10 titres devraient suivre.
Mais pour la filiale d’Editis, la manne viendra surtout de Windows et de sa 10e version, lancée à l’automne. Le système d’exploitation et son environnement, la suite bureautique Office notamment, génère en effet 40 % du chiffre d’affaires de First. "Et comme cette version sera offerte, sous forme de mise à jour, aux utilisateurs des versions 7 et 8, qui représentent 70 % du parc informatique, les ventes devraient être prometteuses ", anticipe Jean-Pierre Cano. Entre 30 et 35 livres, répartis entre les différentes collections, ont donc été programmés d’ici à la fin de l’année. Plus en retrait, Eyrolles publiera quelques livres dans sa série grand public "Hightech" et ENI adressera sa quinzaine d’ouvrages avant tout aux informaticiens chargés de déployer Windows en entreprise.
Un Netflix du livre
Résolument positionnée sur l’informatique technique, la maison nantaise délaisse des formules plus pédagogiques telle "vBook", pourtant lancée l’année dernière, mais qui n’a pas rencontré son public, pour explorer "sur l’ensemble des sujets informatiques, les aspects qui intéressent les informaticiens", précise Antoine Gilles, responsable du commerce en ligne chez ENI. Mais, pour ENI, le relais de croissance réside principalement dans une offre d’abonnement "à la Netflix" lancée en décembre, et qui propose, pour 49 euros par mois, un accès illimité à tous les contenus produits par la maison, livres numériques, vidéos et cours enregistrés. "Ce nouveau mode de commercialisation a pour objectif de fidéliser notre clientèle, en lui faisant découvrir la largeur et la profondeur de notre offre, et de capter celle qui n’achète pas forcément du livre papier", explique Antoine Gilles. Au risque, toutefois, de cannibaliser les autres supports.
Sur la même cible, Dunod a choisi de réduire la voilure en 2015 et de repositionner son offre autour de deux collections, "InfoPro" et "InfoSup", nouvellement créées. François Bachelot, directeur de l’édition de la maison, poursuit parallèlement sa recherche de niches et de sujets innovants, convaincu "qu’avec de bons thème, l’informatique peut encore fonctionner". La maison s’est donc penchée, en février, sur les big data et sur les machine learning. Dans l’actualité, l’ouvrage a rencontré un succès immédiat et son premier tirage s’est vendu en un mois. François Bachelot espère renouveler la performance avec, en juin, Architecture PKI et communications sécurisées, thème sur lequel "rien n’existe en France". Egalement en plein cœur du débat, la cybersécurité s’invite dans les programmes éditoriaux, jusque chez Cépaduès qui publiera, d’ici à la rentrée, une somme en trois tomes sur le sujet.